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Shame: de Brixton à la lumière du monde

Shame: de Brixton à la lumière du monde

En Une: Josh Finerty & Eddie Green -Shame- 2021 photo Benoit weirdsound.net

Lors de la dernière édition du festival Levitation France, je revois Shame avec beaucoup de plaisir. Dès le premier album attendu, Songs of Praise, en Janvier 2018, Shame reçoit des critiques élogieuses. Le groupe se retrouve rapidement propulsé dans la lumière. Il doit enchaîner les tournées épuisantes un peu partout dans le monde. Leur passage à Nantes, en Mai 2018, confirme un groupe talentueux et plein d’énergie. Un deuxième album, Drunk Tank Pink, sort en Janvier 2021. Occasion de revenir, avec le groupe, sur un parcours fulgurant , pas toujours facile non plus à gérer pour des jeunes.

Brixton: les débuts de Shame, à l’ombre de Fat White Family.

Shame en 2016 jouant The Lick que l’on retrouvera sur le premier album Songs Of Praise

Brixton, quartier du sud de Londres….C’est là qu’est né Bowie. Quartier jamaïcain où j’ai eu l’occasion de séjourner 2/3 semaines dans ma jeunesse. C’est là que le groupe Shame fait ses débuts. Je veux en savoir un peu plus sur l’influence que ce quartier a pu avoir sur eux. Ce sont Eddie Green, guitariste et Josh Finerty, bassiste qui vont nous faire partager leur ressenti et leurs souvenirs. « Oui Brixton est un quartier multiculturel possédant un environnement inspirant et je pense, un endroit important pour la créativité et très productif » raconte Eddie. « Un quartier très animé  » … »avec plusieurs salles où nous avons beaucoup joué. Le Queen Head’s, le Windmill et le Brixton Jamm » ajoute Josh.

Le Queen’s Head est le premier pub-repaire de Shame. C’est le père de Charlie Forbes (le batteur) qui connaît alors le propriétaire et va leur permettre de s’entraîner gratuitement. Les membres du groupe viennent souvent vers 5 heures du soir, après l’école. Ils ont 16 ans et montent à l’étage dans leur local. « Beaucoup de choses folles se sont passées là bas » avoue le groupe. Quelques souvenirs? « Parfois il y avait Nathan (Saoudi, claviériste de Fat White Family) qui dormait….il disait -eh les mecs vous n’allez pas me virer….pour jouer »…..raconte Josh. »Parfois nos affaires disparaissaient aussi… comme ma guitare –raconte Eddie– qui disparaît et revient, 3 jours plus tard, couverte de sang!« . Dégoût assuré!

Shame croise souvent alors à ce moment FWF dont le Queen’s Head était aussi, précédemment, le repaire. Mais le groupe ne tombe pas dans ses excès, comme les drogues dures. Quant au proprio du Queen’s Head, c’était « un type gentil » qui parfois vient « tambouriner sur la porte, se trompant d’heure ». Il les a laissés jouer presque un an et demi « gratuitement » avant que le pub ne devienne un pub gastronomique. Il a alors aussi changé de propriétaire.

Le Windmill…et les petites salles

Shame, dans l’ambiance folle et magique du Windmill en Janvier 2017

Bien sûr, il y a la grosse salle de 5000 places, le O2 Academy Brixton -ex Carling Brixton Academy-construite en 1929. Mais à Brixton, la vie musicale plus pointue, pour ne pas dire plus avant gardiste, s’organise autour des plus petites salles. Celles précitées plus haut, auxquelles on peut rajouter le Hootananny et l’Electric. Le Windmill est sans doute le lieu devenu le plus célèbre, au fil des années. Il tient une place particulière pour beaucoup de jeunes groupes du sud londonien. Certains ont fait une courte carrière comme Dead Pretties. Des amis de Shame comme aussi HMLTD qui ont sorti leur 1er album en 2020.

C’est au Windmill que viennent traîner aussi les boss défricheurs de talents comme Dan Carey ou Casper Dee (du label Fuzz). Shame a souvent cotoyé Dan Carey, le patron de Speedy Wuderground. « Je crois qu’on l’a rencontré assez tôt, c’est vrai, mais quand on a commencé, on avait l’impression que, hum, je ne sais pas, tout le monde le faisait, et je ne sais pas, je pense qu’on voulait juste faire notre propre truc » avoue Josh. Dan Carey y a repéré notamment Squid, Black Midi, BCNR ou Tiña entre autres!

 » Il y a des gens de l’industrie musicale qui y vont un soir de semaine au hasard, juste pour voir qui joue, parce que le gars organise toujours de bons événements avec des groupes locaux et d’autres plus éloignés » ajoute Eddie. On peut penser notamment aux excellents français Servo, passés aussi par le Windmill. C’est l’occasion aussi de leur demander s’ils préfèrent les petites salles.

« Je pense qu’il y a quelque chose d’un peu plus unique et personnel à jouer dans une petite salle » explique Eddie…. » j’ai toujours été un fan des petits concerts, parce que j’aime être vraiment proche de la foule, j’aime aussi être capable de distinguer toutes les personnes… j’ai l’impression que les grands concerts se transforment en une masse de gens… ça ne sonne pas aussi bien ».

Premier album, tournées et fatigue…

Charlie Steen et Eddie
Charlie Steen et Eddie Green Festival Levitation France Angers sept 2021 photo benoit weirdsound.net

Le premier album de Shame, Songs Of Praise, sort en Janvier 2018. Paraît-il plus accessible que le second, Drunk Tank Pink? Eddie donne d’abord son avis: « Je ne le pense pas vraiment…c’est une question de goût comme les palettes de couleur….peut-être qu’il peut y avoir quelques choses un peu plus avant garde sur Drunk Tank Pink« … Josh, après réflexion ajoute: « Peut-être que Songs Of Praise est un peu plus simple, un peu plus rudimentaire avec plus de chansons plus accessibles ». Eddie est, par contre, d’accord avec moi. Drunk Tank Pink est « un album qu’il faut écouter plusieurs fois » pour l’apprécier pleinement. « Beaucoup de gens m’ont dit cela » ajoute-t-il.

Après le premier album encensé de toutes parts, arrive le temps des longues tournées. Le groupe est jeune, se sent-il parfois déconnecté? C’est encore Eddie qui se montre le plus bavard. « Définitivement, sur le plan personnel, on avait l’impression de rater pas mal de choses, et quand on est rentré de tournée, on avait l’impression que tant de choses s’étaient passées. Des choses aussi simples que le fait que tous nos amis terminent l’université, trouvent un emploi, cette sorte de petite transition de l’adolescence à l’âge adulte, nous étions en quelque sorte absents pour tout ça« .

Josh Finerty Sept 2021 Angers Levitation
Josh Finerty Sept 2021 Angers Levitation France photo benoit weirdsound.net

« Oui, c’était un style de vie très agité. Oui, mais vous vous sentez un peu déconnecté quand vous êtes loin pendant de telles quantités excessives de temps et quand vous vous déplacez de A à B constamment, il est facile de perdre le contact….Ouais, c’était génial, la seule chose que j’ai trouvée ennuyeuse c’est le manque, ouais, le manque de pouvoir écrire. C’était assez difficile d’écrire quand on était sur la route et j’ai trouvé à la fin de 2018 que j’étais un peu comme un mourant » complète Josh. Il a d’ailleurs eu besoin de faire un long break, réfugié dans sa chambre. Pause réparatrice pour celui qui parcourt la scène de long en large avec sa basse!

Un deuxième album sans trop de pression…

Nigel Hitter sur l’album Drunk Tank Pink ….un zeste de Talking Heads et Charlie Forbes brillant à la batterie!

Le deuxième album, Drunk Tank Pink vient exactement 3 ans après le premier, toujours sur le label Dead Oceans. Produit et mixé par James Ford, il bénéficie d’un son énorme. Le groupe a t-il perçu beaucoup de pression, surtout après un premier opus si acclamé? Eddie puis Josh sont d’accord sur le fait qu’ils ont pu prendre leur temps et éviter une grosse pression.

« Je pense que nous avons eu de la chance que Songs of Praise ait bien marché à cet égard, car je suppose que cela nous a permis de gagner un peu de temps, nous avons vraiment pris notre temps pour le deuxième album. Mais nous n’avions pas vraiment le choix parce que si tu es absent pendant trop longtemps, tu ne peux pas vraiment créer autant que tu le voudrais, ce n’est pas possible » raconte Eddie.

« La façon dont on a fait le deuxième album, c’est qu’on a pris 2019 et qu’on a passé l’année à le « marteler », on l’a fait en grande partie dans ma chambre. Ouais, c’était essentiellement toute l’année 2019, c’était comme notre année de repos de la tournée…. et puis on est arrivé à 2020. Nous étions prêts à nouveau, alors nous avons arrêté nos morceaux » précise Josh..

Je souhaite qu’ils me parlent un peu plus des Talking Heads et de leur influence. Je la percevais déjà dans le premier album. « Oui, définitivement une grande influence, nous parlions juste hier du fait que les Talking heads étaient quelque chose que nous avons essayée de faire avec le 1er disque un peu, ça n’est pas venu !…On n’y est pas arrivé » semble regretter Eddie. Puis il ajoute: « Ouais, Sean (Coyle Smith, l’autre guitariste)adore aussi Talking Heads, j’aime aussi Talking Heads, en termes de simplicité et d’efficacité dans l’écriture des chansons. »

Pas de message politique….mais des prises de conscience.

Nous évoquons rapidement les aleas de la pandémie qui ont conduit à l’enregistrement du Live in The Flesh dans une salle vide, l’Electric. Un très bel album tout de même enregistré en Octobre 2020 et paru pour le RSD en Juin 2021. Quelques réflexions aussi sur ce qui peut sensibiliser Shame aujourd’hui. Entre thématiques sociétales, environnementales et évidemment politiques, vastes champs! Le groupe se sent interpellé par les changements climatiques mais a presque un peu honte: « C’est difficile avec ce que nous faisons…Voyager à travers le monde n’est pas toujours très écologique« !….

Les « actions communes et les revendications de protestation peuvent elles aller plus loin » vu le contexte…se demandent les deux compères. « En effet, la logique des pétroliers c’est de faire de l’argent » souligne Eddie. De plus « le gouvernement est très figé…il ne se préoccupe que de ses intérêts…les impôts augmentent, l’aide sociale diminue-60 livres par semaine »…..la classe ouvrière a été broyée… « Il y a aussi toute une génaration de jeunes qui ont manqué d’informations sur des expériences à mener…comme parler, à l’école, de recyclage des déchets ».

Difficile de vouloir délivrer un message pour Shame. Ce n’est pas une volonté traduite dans leurs textes comme d’autres groupes récemment (Yard Act ou BCNR notamment). Il ne faut pas se voiler la face mais pas non plus sombrer dans le pessimisme le plus noir. Pour beaucoup de jeunes, la situation est déjà assez anxiogène comme cela!

Epilogue: rendez vous pour le prochain album…sur la planète Cluj!

This Side Of The Sun, dernier titre proposé par Shame en Novembre dernier

L’entretien se termine sur une note provoquant l’hilarité générale! Je souhaite savoir quel sens faut-il donner à la dernière phrase du titre Station WagonJoin us to planet Cluj! « C’est une nouvelle direction où nous nous retrouverons tous plus tard »! me confie le groupe.

Précision…tout est parti d’un conte imaginé par Charlie Steen, chanteur et parolier…..Josh aurait regardé à travers un télescope et découvert une planète que personne n’avait jamais encore vue…la planète Cluj. C’est là que Shame va écrire son nouvel album et le rapporter aux terriens. Quand on en écoutera les paroles-à l’envers- le message sera délivré. Cela donnera l’endroit et l’heure du rendez-vous. Vous serez alors téléporté sur la planète Cluj, où vous vivrez en paix, pour l’éternité avec…Shame! Beau programme? A suivre!!

Nous retrouverons Shame, à la Route du Rock le 12 Mars 2022 à St Malo

Au Festival Check In Party, Shame sera aussi présent le 19 Août avec Fontaines D.C et autres groupes! (voir lien ci dessous)

https://www.checkinparty.com/

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