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Phoxjaw, Royal Swan, un album historique

Phoxjaw, Royal Swan, un album historique

Royal Swan, un album attendu au tournant

Le quartet de Bristol Phoxjaw a sorti en juillet dernier son second et très attendu LP, Royal Swan. Encensé par la presse indé depuis leur formation en 2016, Phoxjaw avait tout d’abord sorti un E.P., Goodbye Dinosaur, puis un premier album en 2019, A Playground For Sad Adults. Okay, nous avions raté le coche. On ne peut pas être partout à la fois… Ils étaient donc guettés de près : comme bien souvent la sortie et production du second album est un passage difficile, moment clé où le groupe peut aussi bien transformer l’essaie qu’échouer à convaincre.

Il y avait donc un gros challenge pour eux. Ils étaient attendus au tournant et l’attente valait le coup. Royal Swan sonne comme un défi aux musiques du temps présent : cassez les barrières et libérez l’énergie. En effet, leurs compositions sont relativement inclassables, folles et d’une efficacité redoutable. Entre grunge, metal, noise, math rock, les influences semblent se bousculer dans chaque titre comme la foule aux portes du vélodrome avant chaque match de l’OM—je sais une métaphore footballistique venant de ma part a quelque chose d’incongru.

[…] the album as a whole is built around metaphorical references to British history.

[…]l’ensemble de l’album est construit autour de références métaphoriques de l’histoire britannique.

Danny Garland pour Kerrang
Phoxjaw, Royal Swan, 2020

De A Playground for Sad Adults à Royal Swan, un pas de géant, une identité affirmée

Leur première production sortie donc en 2019 présentait un panel de styles et de sons qui pouvait difficilement les faire entrer dans une case. Ce n’était d’ailleurs pas tant la difficulté de cerner un style, qu’un trop grand éparpillement qui nuisait à la cohérence du tout. En effet, d’un titre à l’autre, la voix de Danny Garland pouvait se faire moqueuse, fleurtant avec des intonations à la Andy Partridge (XTC) et des passages qui lorgnaient vers le hardcore. Le partage du chant avec le guitariste, Alexander Share, ne facilitait pas l’impression d’homogénéité.

La musique, pas en reste, partait un peu dans tous les sens, New Wave, pop, noise, emo, avec une prédilection pour les passages dissonants. On oscillait entre XTC et At The Drive In. Le son de guitare restait relativement sage, avec pas mal de feedback, des mélodies en arpège. Mais toujours une énergie servie par un sens de la mélodie qu’on va finir par croire propre aux groupes british.

Royal Swan redresse la barre et nous propose une musique plus mature et affirmée qui, même si les interprétations vocales très variées suivant les morceaux sont encore la règle, forge un véritable style et un son crossover. Alexander Share, vient doubler quasi systématiquement les mélodies et chante sur certains titres, les voix des deux musiciens s’accordant cette fois-ci parfaitement pour faire naitre une sonorité bien particulière et reconnaissable. Les rythmes lourds et les riffs presque metal apportent une touche stoner ou death. Par moment, on se prend à se dire que certaines parties rythmiques ne détonneraient pas sur titre de Gojira!

Revisiter l’histoire british sans nationalisme…tout en cherchant son identité. Mmmh…

Décidément, cette année, alors que les nationalismes s’exacerbent, que les tensions identitaires augmentent, les groupes se sentent obligés de remettre les pendules à l’heure en ce qui concerne l’instrumentalisation de l’Histoire par les politiques et manipulateurs de tout bords (aparté : je vous invite à lire à ce sujet, le passionnant essaie de Laurent Olivier, Le Pays des Celtes au Seuil/l’Univers Historique). Au risque de tomber eux-mêmes dans une forme de manipulation du fait historique. Ainsi, après le formidable Palimpsest de Protest The Hero (ici), c’est au tour de Phoxjaw de faire référence à l’histoire de leur pays au travers des titres de ce nouvel album. Comme le déclare Danny Garland, bassiste/chanteur :

“I don’t want our music to be preachy – I find that boring.” “Phoxjaw is a fun band, and one that prefers working with fantasy and fiction.”

« Je ne veux pas que notre musique soit préchi-précha-je trouve ça lassant. » « Phoxjaw est un groupe fun et qui préfère travailler avec la fantasy et la fiction »

Kerrang

Aussi, le choix du musicien s’est porté sur une sorte d’univers de fables aux relents médiévaux mais ancrés dans le présent…, ceci afin de traiter ce qui définirait une sorte d’identité british—britishness. Autant dire que l’exercice est difficile et peut prêter à des interprétations tendancieuses. C’est aussi pour lutter contre un sentiment anti-british lié au Brexit que le musicien aurait ressenti dans le reste de l’Europe (?) qu’il s’est lancé sur cette thématique.

Retrouver l’essence de la Britishness

Afin de trouver l’essence de cette « britishness »—qui soit dit en passant est un sentiment inventé de toute pièce dans les années 50-60 fantasmant un passé impérial glorieux et fait l’éloge d’une certaine ruralité de l’Angleterre—le groupe s’est isolé dans une ferme au pays de Galles (pour une véritable réflexion musicale sur l’histoire du Royaume Uni, peut-être vaut-il mieux se pencher sur le très bon album de P. J. Harvey Let’s England Shake). C’est la face mythique de l’Angleterre que recherchaient les quatre compères, notamment au travers de la langue (ré-écoutez donc Gwenno) en s’isolant dans cette contrée de légendes et d’histoires de lutins. Pourtant, des textes comme You Don’t Drink A Unicorn Blood font directement référence à des évènements actuels. L’histoire du sang de licorne bu par le méchant Voldemor dans Harry Potter sert ici à dénoncer ceux qui s’exhibent sur les réseaux sociaux posant avec leurs trophées, lion, rhinocéros…, les licornes de notre monde réel.

Une musique allumée et sans tabou

L’album débute doucement sur un court instrumental, Charging Pale Horse, qui s’enchaine directement avec un morceaux très « foalsien » , Trophies in The Attic dont le titre laisse deviner le contenu : on déterre de vieux souvenirs dans le grenier. Métaphore peut-être un peu lourde, mais un titre qui met directement dans l’ambiance de l’album avec ses alternances de couplet pop et de refrains plus dissonants. Si les bristoliens ne se prennent pas au sérieux dans leurs texte, il en est de même avec leur musique qui n’hésite pas à casser les genres.

On regrettera un peu un léger essoufflement dans les titres avec Bats For Bleeding—sur lequel Alexander Share qui prend le lead vocal adopte des accents de Peter Murphy et The Monk. les deux titres restant tout de même de très bonne facture! Mais ils semblent préparer l’explosion finale. L’album se clôture en effet sur le très épique Royal Swan qui, au long de ses sept minutes de paraboles sur les inégalités sociales, nous promène de ballades en refrains et riffs rageurs, appuyés par des rythmes lourds, « doomesques », qui frappent donc tel le marteau du destin, pour finir par s’évaporer dans une fin éthérée autant que psychédélique.

Phoxjaw réussit le parfait équilibre entre expérimentations sonores et mélodies accrocheuses, riffs efficaces et gimmicks distordus. Un croisement improbable entre My Bloody Valentine, Arctic Monkeys qui auraient macéré dans une marmite de Death Metal et de punk. On pourrait prendre le pari que, au même titre qu’At The Drive-In avec Relationship Of Command, le groupe de Bristol avec Royal Swan va poser une nouvel pierre dans l’édifice du rock.

Liens :

https://phoxjaw.bandcamp.com/

https://www.facebook.com/phoxjawofficial/

https://twitter.com/phoxjaw

https://www.hasslerecords.com/

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