Alors que le festival Aucard publiait sa programmation il y a quelques mois, le nom d’un jeune groupe de L. A. trainait dans les chroniques des blogs et webzines anglophones. Ceux-ci ne trahissant pas d’éloge pour ce dernier, Moaning commençait donc à faire parler d’eux, et Aucard annonçait simultanément qu’ils seraient à l’affiche du festival. Curieux, j’ai donc jeté une oreille (que j’ai récupéré depuis) à la musique de ce jeune trio. Signé directement chez Sub Pop après être passé dans les mains d’un grand producteur qui est lui-même allé les chercher, la presse s’était emparée du phénomène.
Moaning, c’est une musique qui mélange la cold wave, la new wave, Nirvana, Sonic Youth ou encore My Bloody Valentine, avec une voix qui fredonne avec une nonchalance adolescente sur des plages de guitares, de synthés et de basses qui alternent maelstrom sonore et passages plus calmes. J’avoue que j’ai été séduit par la musique de Sean Solomon, Pascal Stevenson, et Andrew MacKelvie.
Aussi, lorsque l’organisation me fit parvenir la liste des demandes d’interview, je n’hésitais pas une seconde et demandais à rencontrer le groupe. Sous la tente commune, quelques heures avant le début du festival, nous nous asseyons dans des canapés un peu trop profond et entamons la discussion.
Weirdsound : Bonjour Moaning, comment avez vous choisi votre nom, est-ce à cause de votre façon de chanter ou parce que lorsqu’on tape « moaning » sur internet on tombe sur des sites porno ?
(Rires)
Sean (Chant/guitare) : j’aime bien le fait que le nom soit associé à deux sens, à la fois plaisir et douleur. Nous avons donc choisi ce nom car il était approprié pour notre musique qui a pas mal de variations, entre légèreté, douceur et au contraire des sons plus violents, durs.
WS : Pouvez-vous revenir un petit peu sur votre histoire, depuis quand vous jouez ensemble ? Le lycée, peut-être ?
Sean : Ouais, c’est exactement ça ! On est de L.A . et nous nous sommes rencontrés adolescents, avons joués dans différents groupes depuis dix ans et avons décidés de fonder Moaning. Le producteur Alex Newport (At The Drive In, Bloc Party…) nous a repéré et à décidé de produire notre album. Puis nous l’avons envoyé à Sub Pop qui nous a signé rapidement, et on est parti en tournée pour promouvoir l’album.
WS: Ça ressemble à un conte de fée !
Sean : Oui, c’en est un ! C’est quelque chose dont nous avons toujours révé.
WS : Alex Newport est un grand nom dans la production !
Sean : Oui, il a enregistré pas mal de disques.
WS : Comment ça se passe la réception en France jusqu’ici ?
Sean : Nous passons un sacré bon moment en France et le public a été super, les gens sont très gentils.
WS merci pour les français (on est toujours surpris de ce que les étrangers pensent de nous. C’est souvent contre-intuitif). J’ai trouvé beaucoup d’influences 80’s/90’s dans votre musique, excusez-moi, mais vous êtes assez jeunes, donc avec quelle genre de musique avez vous grandi ?
Sean : J’ai commencé à écouter de la musique avec les Beatles, Nirvana, puis j’ai découvert Sonic Youth, le troisième album de Nirvana, et puis des trucs comme The Vaselines, ce genre de choses, j’ai grandi en découvrant de plus en plus de groupes de ces époques, mais Pascal (Stevenson, le bassiste) est encore plus dans ce genre de musique que moi.
Pascal (basse/clavier) : Oui, j’ai toujours eu des posters des Talking heads, mon père avait ça et il me montrait des disques et photo de ces groupes. J’ai vraiment été à fond dans les Talking Heads, ils ont une telle discographie ! Et puis, je me suis intéressé à d’autres groupes de l’époque, pas mal d’ailleurs sur le label Factory (Joy Division/New Order) et aussi Siouxsie and the Banshees…
WS : Mais vos parents étaient musiciens ?
Collégiale : Oui, carrément, ils jouaient tous de la musique, mais aucun au niveau où nous en sommes.
Sean : Mon oncle a enregistré et produit des groupes, il a aussi joué dans des groupes qui étaient signés chez SST, le label de Black Flag. C’est aussi lui qui m’a donné ma première guitare. Il m’a également offert un enregistreur 4 pistes. Et quand j’ai eu quelque chose comme 14 ans, j’ai commencé à enregistrer dans ma chambre, plus comme un hobby. Plutôt que de jouer aux jeux video.
Pascal : Oui, je pense que l’époque dans laquelle nous avons grandi, avec la technologie qui existait… j’ai eu un enregistreur quand j’ai eu 12 ou 13 ans, et je sais que c’est la même chose pour Andrew (Mc Kelvi, batteur), nous avons tous fait du home-recording très tôt, et c’est devenu quelque chose de très commun pour les ado d’avoir la possibilité de s’enregistrer dans leur chambre. Et c’est vraiment cool.
WS : Et avec Bandcamp et ce genre de site, c’est assez facile de diffuser de la musique.
Pascal : Oui, et internet donne aussi la possibilité de découvrir un sacré tas de groupes, existants ou ayant existé, aussi les influences des groupes actuels viennent d’un peu partout, de toutes les époques.
WS : Est-ce que vous connaissez des groupes français ?
Moaning : Des groupes français ?
Pascal (qui semble très pointu musicalement!) : Oui, il y en a un que j’aime particulièrement appelé A silent party (si un lecteur connaît, je veux bien plus d’informations sur ce groupe inconnu au bataillon…) des années 80, ils ont sorti un ou deux albums.
Andrew : Oui, il y a Cortex dans les années 70 qui faisait du jazz.
WS Vous connaissez plus de groupes français que moi !
(rires)
WS : la dernière (ou presque), y a t’il une question qu’on ne vous ai jamais posé et à laquelle vous souhaiteriez répondre (va falloir trouver mieux, Mr Moonlight, ça sent la question usée)?
Sean : Quel effet ça fait d’être le groupe de rock le plus célèbre du monde, ou un truc comme ça… (rires)
WS : Eh, peut-être que vous aurez la réponse d’ici à quelques années…
(Rires)
WS : Je vous le souhaite. La dernière, pouvez vous résumer le sujet de vos morceaux.
Sean : Le premier album était centré sur le nom du groupe, une sorte de manifeste sur la confusion qui peut parfois être faite entre plaisir et douleur. Je crois que dans beaucoup de différentes périodes de la vie, même dans les relations familiales, ou amoureuses, vous avez besoin de l’un pour pouvoir ressentir l’autre, de l’un pour apprendre l’autre, il y a donc beaucoup de morceaux qui tournent autour de ça. C’est personnel, mais écrit dans un esprit d’universalité.
WS : C’est un peu un point de vue sadique, au sens propre du terme, non ?
Sean : Oui, c’est possible, mais c’est aussi indéniable qu’il y ait du bon et du mauvais dans le monde. Mais bon, beaucoup de nouvelles chansons parlent d’autre chose, peut-être plus personnelles, et heureusement nous avons d’autres sujets dont nous pouvons parler !
(rires)
Merci beaucoup à vous trois!
Liens :
https://www.facebook.com/moaningmusic
https://moaning.bandcamp.com/album/moaning-2
https://www.subpop.com/