Beersplaning en compagnie de Mini Skirt et F(l)outre
Mardi 24 mai… Un début de journée des plus classiques… Un réveil avec les yeux qui partent en diagonale, une haleine fétide, l’envie d’un café, puis d’un deuxième. La préparation commando démarre : douche, brossage de dents, un troisième café puis c’est le départ au taf. C’est au quatrième café (celui avec les collègues) que je commence à organiser la soirée à venir. Un seul projet : un pote, une bière (ou deux), refaire le monde. Sauf que ce projet a évolué à une vitesse grand V. Mes potes Geoffroy & Théo me signalent (lors de ma proposition d’un apéro after-work) un concert de F(l)outre, groupe 100% nantais en 1re partie du groupe de post-punk australien Mini Skirt en tournée en France et en Europe au cours du mois de mai. Aucun besoin d’argumentaire supplémentaire, le rendez-vous est pris à 19h30 au bar Duchesse, rue Joffre à Nantes, pour une soirée hyper vitaminée.
Duchesse, un bar et une scène underground ?
Ancien Cour 87, Duchesse, ouvert depuis 2020, accueille de nombreux concerts et de très bons groupes grâce au punch incroyable de ses gérants, un excellent réseau musical (Back To Garage, Rip It Up & ROCK Voisine notamment) et une clientèle de « passionnés de musique » et de « musiciens passionnés ».
Rappelez-vous déjà, en 2020, les tout nouveaux propriétaires avaient accueilli Jeffrey Lewis and the Voltage (et Teenage Bed) que votre serviteur s’était, tout d’abord, fait un plaisir de voir… mais aussi de vous narrer dans un live report.
J’espère en tout cas attirer votre attention sur cette très belle adresse nantaise : une ambiance excellente, la possibilité d’y croiser régulièrement des artistes du cru nantais (au bar), Dominique A, les French Cowboys, …et une programmation audacieuse mais dense pour des concerts à des prix modestes.
Rien à F(l)outre ?
Moins d’une dizaine de dates à leur actif, F(l)outre affiche pourtant un bon taux d’attractivité, les premières notes résonnent et nous avons déjà du mal à nous hisser au 3e rang du concert. Tension, hystérie collective accompagnées de pogo de cheveux d’un public multigénérationnel.
Premier constat, F(l)outre n’est pas venu là pour enfiler des perles. Le son est puissant, les musiciens sont énergiques, charismatiques et en quasi-transe dès le premier morceau. L’énergie impressionnante de Jules à la batterie rythme une musique post-punk-noise littéralement décomplexée. De la virtuosité, une sacrée cadence… et pour couronner le tout, Jules pousse la chansonnette tout en maltraitant ses baguettes (bon, on écoute du punk, vous n’êtes pas avec Cœur de Pirate, hein).
F(l)outre, un groupe déjà mature sur scène
En moins de 5 minutes, une impression claire se dégage : de la maturité… enfin une maturité à base de décibels élevés permettant de disloquer les bouchons de cérumen des auditeurs / spectateurs. Nico, barman émérite du Zazou et guitariste désinvolte de F(l)outre (ou l’inverse), prend la parole très efficacement entre les morceaux. L’objectif est limpide, on balance du son, on enchaine les morceaux et on remplit le temps de cerveau musical disponible des néo-fans du néo-groupe ligérien jusqu’à 21h pétantes.
On retrouve de nombreuses influences 90’s chez F(l)outre, un grunge granuleux, un post-punk sans fioriture et une culture musicale fluctuant entre noise et hardcore. Les quelques problèmes de retour son de Jean sont très rapidement réglés, et l’ancien bassiste de Nursery (splité 10 jours avant le concert à notre grand regret) fait parler son expérience.
Alors si F(l)outre me lit… je n’ai pas retenu tous vos morceaux, je m’en excuse. Mais quel p***** de plaisir à vous écouter. Les titres à base de breuvage ou de nourriture ont été une catharsis au niveau de mon foie, notamment la minute chrono de Glace au Nutella et les riffs ravageurs de 8/6.
En bref, Nantaises, Nantais, foncez donc voir ces 3 énergumènes. Ça vaut le détour, ils sont plus que talentueux et arpentent bars et bas-fonds nantais.
A découvrir le live filmé de F(l)outre par Ronan Concertsmusiclive au Ferrailleur la même semaine :
Mini Break puis Mini Skirt
Tout juste remis de nos émotions, mes acolytes de soirée et moi-même nous dirigeons vers l’entrée du bar prendre l’air pour quelques minutes, et aller recharger les batteries de nos verres de bière. Nous sommes unanimes sur le concert de F(l)outre et avons hâte d’en découdre avec Mini Skirt.
Nous entendons d’ailleurs rapidement leurs premières notes et nous redirigeons à toute vitesse vers l’arrière-boutique du Duchesse.
En tournée Française et Européenne, les Australiens prennent du bon temps en Europe en enchaînant les dates, matant des concerts et passant des bonnes soirées. On les avait croisés dans le public de F(l)outre, dehors en train de boire des bières et fumer des clopes ou même faire leur setlist à l’arrache derrière le comptoir de merchandising de fortune jouxtant la scène de concert.
Assez impatient, je suis très enjoué à découvrir cette session live… et suis donc bizarrement non convaincu par leur premier titre Pressure. Ça ne fait pas tilt dans mon esprit. Assez convenu et facile en termes créatifs… je commence à me faire des nœuds à la tête sur la qualité du concert à venir…
L’électrochoc punk Mini Skirt !
Mal m’en a pris. Tel un van Volkswagen, le chanteur Jacob Boylan et son équipe fonctionnent au diesel. La montée en puissance me fait me sentir coupable de ces mauvaises pensées initiales dès le 2ème titre Brigantine ST. L’intensité musicale, les riffs électriques et les coups de marteaux du batteur Jacob Pumphrey ont l’effet d’un électrochoc sur une salle affichant complet.
Le rock nous parle, le public et les musiciens transpirent. La mayonnaise prend, les sourires s’affichent dans les yeux et oreilles de certains, et dans des mouvements incontrôlés et épileptiques pour d’autres.
Le leader charismatique est possédé, son marcel tombe dès le 3e morceau et c’est complètement entouré de son fil de micro tel un zébulon pratiquant le shibari que Jacob Boylan réalise des avancées récurrentes dans le public, limite à nous postillonner dessus (on est rock’n’roll ou on ne l’est pas). Ces zikos restent impassibles derrière, mais au gré d’une brutalité musicale distillée notamment par le guitariste Cam Campbell.
Les enfants spirituels d’Amyl and the Sniffers et d’Idles
Aucun doute désormais, Mini Skirt joue dans une cour similaire à Sleaford Mods, Idles, Amyl and the Sniffers ou Frank and the Rattlesnakes, groupes qui te créent un véritable uppercut à chacun de leurs concerts. Et c’est, de mon avis, bien plus addictif en concert, avec toute cette frénésie environnante que sous un casque vissé sur les oreilles ou à l’écoute d’un vinyle en buvant un verre de Chardonnay dans son salon aux accents Maisons & Travaux.
Rappelez-vous : Rock, Transpi, Décibels, & Bières !
Les titres se suivent aussi vite que le vent qui souffle en tempête. Leur album Casino sorti en 2020 est à l’honneur ce soir, notamment avec les excellents titres WIth Your Hands ou Face of the Future. Des morceaux courts, efficaces, pas de perte de temps à causer avec le public. Jacob se risquera juste quelques mots en français.
Un final anthologique
On retient également la basse agressive et métronomique de Jesse Pumphrey et une atmosphère, de nouveau hystérique après F(l)outre, avec des slams où le risque de percuter le plafond s’élevant à 2,70 mètres est plus important qu’une chute non désirée parmi les auditeurs agglutinés devant la scène ouverte.
Le concert s’arrête aussi brutalement que celui-ci fut rapide, sur le titre Pretty, dans un sentiment d’allégresse générale. Une petite bulle punk que nous aurions aimé voir prolongée de quelques morceaux.
On redescend donc doucement, l’extase musicale persiste encore un peu. Temps pour nous de causer avec Nico de F(l)outre, Jesse Pumphrey de Mini-Skirt (qui nous paye une bière), et Julien, patron du Duchesse, heureux de la qualité du concert de ce mardi 24 mai.
La dure loi des soirées en cours de semaine refait surface… il est déjà temps d’aller se reposer pour éviter que le lendemain matin ne soit une nouvelle mission commando.
En attendant un mois de juin qui s’avère riche, dense, intense en programmation musicale…
A très (très) vite, chers lecteurs !