L’année dernière, votre dévoué serviteur a découvert le premier album du projet The Moonlandingz intitulé : Interplanetary Class Classics. Hormis la chronique dithyrambique que j’en ai fait, j’ai dû écouter cet album pendant au moins six mois non stop, il est tout simplement génial! Si vous ne l’avez pas écouté, vous êtes tout simplement passés à côté d’un des disques les plus rafraichissant de l’année passée, une merveille redonnant tout son sens au terme « indé »…
Prenant mon courage à deux mains, j’ai décidé de contacter les malfaiteurs qui sont à l’origine de The Moonlandingz, j’ai nommé Adrian Flanagan et Lias Saoudi. Les deux garçons sont du genre hyperactifs! Adrian travaille sur ces projets pour ses deux groupes The Eccentronic Research Council et International Teachers of Pop. Lias, de son côté, retourne en studio pour le nouvel album de Fat White Family prévu pour cette année.
Adrian a quand même pris le temps de répondre à nos questions, et nous l’en remercions! Je vous laisse découvrir ci dessous notre brin de causette avec lui : attention, ça décape un peu!
Weirdsound : Toi même et Lias, êtes de retour sur vos propres projets , vous avez pris le temps de souffler un peu quand même?
Adrian : En temps normal, j’ai 2 ou 3 projets qui avancent en même temps! Écrire de la musique et des paroles, c’est ma principale occupation quotidienne. Je suis très content d’attendre tranquillement mon départ pour le paradis en m’occupant de cette manière, et je remercie la vie de me laisser la liberté et du temps pour faire ce que j’aime. Tu sais, dormir c’est pour ceux qui n’ont rien d’autre de mieux à faire!
De son côté Lias est occupé avec les dernières retouches concernant l’enregistrement du prochain album de Fat White Family. Pour ma part, je bosse avec Dean Honer sur un album pour notre projet acid disco, nommé International Teachers Of Pop! Ça avance bien, et nous avons donné nos deux premiers concerts à Derbyshire avec Jarvis Cocker. On au aussi des nouvelles choses en tête et des textes pour Eccentronic Research Council, et quelques idées pour une suite pour les Moonlandingz..
Weirdsound : Vous sortez d’une grande tournée mondiale pour The Moonlandingz, vous vous supportez encore? Parfois les tournées ça met les nerfs à rude épreuve…
Adrian : C’est inévitable quand tu passes 13 heures par jour dans un bus qui parcoure toutes les autoroutes d’Europe, avec peu de sommeil et pas mal de promiscuité…Forcément, il y a un moment où tu tapes sur les nerfs des autres et inversement! (rires)
Tu deviens proche des autres très très rapidement quand tu es sur la route…Tu finis par connaitre tous les moyens de pousser les autres à bout. Comme une famille, il y a de la bagarre et ça se chamaille, des fois tu t’emmerdes tellement que ça devient un moyen de passer le temps! Cependant, j’aime chèrement toutes les personnes qui sont dans les Moonlandingz! On a tous des sacrés caractères, un peu tarés, mais quand on est dans un bon jour c’est la meilleure bande possible! Je me ferai tuer pour n’importe lesquels d’entre eux!
Weirdsound : L’album des Moonlandingz, Interplanetary Class Classics a été bien reçu par le public, visiblement vous bossez sur un second disque, on peut en savoir plus? Aura t on la chance de réentendre parler de Johnny Rocket?
Adrian : Pour les 18 prochains mois, Lias va mettre de côté le costume de Johnny Rocket, pour se concentrer sur la sortie du prochain Fat White, et sans doute pour tourner avec eux un peu partout sur la planète.
On va profiter de cette période pour réfléchir et écrire des nouvelles compositions pour les Moonlandingz, et peut être qu’en 2020, ce qui sonne à l’oreille comme une année super futuriste, vous aurez le droit à un second album…Mais mec, garde bien à l’esprit que les Moonlandingz sont uniquement là quand les gens ont besoin d’eux, pas quand ils le souhaitent…Il va falloir être patient!
Weirdsound : Concernant le personnage de Johnny Rocket, David Bowie a t il été une source d’inspiration?
Adrian : Musicalement ce n’est pas le cas, ou du moins pas directement, mais le personnage de Johnny Rocket sur scène ou dans les vidéos est une caricature reprenant les codes des rock stars du passé comme pouvait l’être Bowie en son temps.
Tu sais, il y a quelque chose de terriblement héroïque concernant Johnny Rocket : il bosse dur pour être une rock star mais il n’y arrive jamais vraiment, ça le rend adorable…C’est un héros complètement pathétique!
Weirdsound : Quand Interplanetary Class Classics est paru, les journalistes aimaient bien vous demander votre avis sur le Brexit…Depuis, Trump est arrivé à la Maison Blanche, Poutine est réélu, le président chinois est devenu président à vie.En France, on en est pas là, mais ce n’est pas terrible non plus! Quand on voit tout çà l’échelle mondiale, est ce qu’on est en droit de se demander si être bête ou raciste est super tendance?
Adrian : C’est une époque particulière mais intéressante, où nous sommes les témoins et les commentateurs de ce cirque de politiciens complètement débiles! Ça devient tellement n’importe quoi que même Kim Jong Un passe pour un mec intelligent, sensible et raisonnable…
Au final je pense que les choses vont aller aussi mal qu’on peut l’imaginer, jusqu’au moment où le monde entier va réaliser qu’il est temps de se réveiller, et qu’il y a des choses plus importantes à faire que de s’envoyer des photos de bites et de seins à n’importe qui sur What’s App! (rires)
Aux USA, ils ont un acteur de cinéma, Mark Ruffalo, qui est super engagé politiquement. Est ce que vous pensez que c’est le devoir d’un artiste d’aller sur ce terrain là? D’utiliser son influence médiatique pour tenter d’améliorer les choses?
Adrian : Pour moi, en tant qu’artiste, il est important de documenter la période dans laquelle on vit. Pas d’une manière chiante à la Billy Bragg, mais plutôt d’une manière qui mélange humour et pathos. Les mots peuvent etre comme des petites bombes qui explosent dans la tête! Ces derniers, combinés avec un air de musique psychédélique fun, c’est notre seule arme offensive!
Je pense que, quand les artistes s’éloignent de leur environnement ou s’en déconnectent, ils se mettent à dépeindre des paysages, par exemple anglais, qui n’existent plus depuis longtemps. ils finissent par ressembler à ta grand mère raciste qui est resté plantée dans les années 80, et qui te fous vraiment la honte!
Weirdsound : Et sinon à propos du Rock N Roll? Quand nos parents en écoutaient, c’était un acte anti système, un truc irrévérencieux vis à vis de la société. De nos jours, j’ai l’impression que c’est devenu une musique d’intellectuels prétentieux qui se regardent le nombril! Est ce qu’on peut quand même garder espoir? Est il encore possible de considérer le rock comme une musique de rebelles?
Adrian : Je pense que le Rock N Roll, considéré comme un mode de vie, est définitivement mort. C’est juste un putain de cliché. La drogue, les groupies, courir après tout ce qui bouge avec ta queue à l’air, c’est juste super convenu, ça rime à rien.
Par contre, on peut parler de l’esprit du Rock N Roll! Au sens le plus viscéral ça se traduit par avoir l’envie de jouer d’un instrument aussi fort que tu peux avec tes potes dans le garage de tes parents…Ça mon pote, ça maintient le rock vivant! Sinon je peux aussi te conseiller de brûler un cierge pour le repos de l’esprit du Rock N Roll et du punk, au moins une fois par mois à l’église…(rires)
Weirdsound : Finalement, le rock et le punk sont peut etre devenus exactement ce qu’ils ne voulaient pas devenir?
Adrian : Comme je te le disais à l’instant, le Rock ou punk, c’est le même état d’esprit, une musique anti système, jouée avec passion. La seule vraie différence, c’est que tout le monde ne peut pas jouer comme Scooty Moore, mais la majorité des gens peuvent jouer du punk comme Sid Vicious! Même mon chien est un meilleur joueur de basse que Sid Vicious! (rires) Pour en revenir aux hipsters, tu leurs diras que le rock, c’est une occupation de vrais mecs avec les couilles pleines de testostérone , qui mange des steak et des chips! (rires)
Weirdsound : On a une conversation super intello en fait… En parlant de culture, tu as du temps pour lire ou pour regarder des films?
Adrian : Je plonge dans les livres pour me défouler! Récemment j’ai lu la biographie de Cosey Fanni Tutti, qui était vraiment génial. J’ai enchainé avec un livre sur un groupe religieux nommé le service de 09 heures qui était de Sheffield et qui a une réputation sulfureuse… Sinon j’ai tendance à regarder des documentaires, notamment sur Netflix, en ce moment je suis The Wild Wild Country qui est super marrant!
Weirdsound : Les clips qui ont été réalisés pour les Moonlandingz sont super sympas! Vous n’avez jamais voulu faire un court métrage basé sur l’univers du groupe? Il y aurait de quoi faire pourtant.
Adrian : Merci! Je pense que l’album de Eccentronic Council Research concernant Johnny Rocket ferait surement un bon court métrage! Si quelqu’un veut en faire un, qu’il n’hésite pas à m’envoyer un fax! (rires)
Weirdsound : Sur les réseaux sociaux ou dans vos interviews, vous parlez souvent des groupes de musique que vous appréciez peu, et finalement assez rarement de ceux que vous aimez bien…Il y en a bien quelques uns quand même?
Adrian :J’aime des centaines de groupes et de disques, si tu me lances là dessus je peux t’en parler toute la journée! Alors tu vois, c’est plus rapide et simple de parler des groupes que je n’aime pas! (rires)
Les Foo Fighters par exemple, devraient jeter leurs guitares et arrêter la musique, pour devenir enfin des putains de bucherons!
Weirdsound : Et si on se concentre sur l’Angleterre? On a l’impression que les anglais et les américains restent les meilleurs pour ce qui est du rock…
Adrian : Je vais te confier un secret, la raison pour laquelle j’ai décidé de faire de la musique est simple : La musique anglaise actuelle est tellement médiocre que j’essaie de réaliser moi même les albums que je voudrai avoir dans ma discothèque. C’est plutôt bien que les jeunes musiciens se politisent, mais au bout d’un moment ça devient…convenu.
C’est comme la scène des années 1980, avec les Red Wedge (NDL : mouvement proche du parti travailliste, regroupant des groupes anglais comme les Communards). Après avoir donnés plusieurs concerts, ils ont commencé à se balader partout en prenant l’attitude et le ton de mecs intelligents, politiquement engagés, et surtout économiquement « ouverts » d’esprit! La bonne blague. En ce moment au Royaume Uni, tu as un paquet de ces affreux groupes dit de musique indé qui font de la merde qui sonne comme Shame 69 ou une mauvaise face B des Clash…
Leur idée de la rébellion en politique consiste à monter une manifestation devant le parlement en chantant le nom de Jeremy Corbyn sur un air de White Stripe…Et çà résume à peu près leur niveau d’engagement, la moitié d’entre eux ne va pas voter.
Je déteste cette nouvelle mode des manifestants pacifiques qui prennent le temps de faire de selfies pour les coller sur Twitter. Toutes les semaines tu t’en tapes : » une photo de moi avec ma pancarte rigolote, marchant dans Londres avec trois mille personnes qui ont aussi des pancartes rigolotes… » Bordel, c’est affligeant!
Manifester en Angleterre c’est devenu une sorte de journée familiale qui ressemble au carnaval. Là dessus, on a beaucoup à apprendre de vous. Quand les gens au pouvoir tentent de de vous baiser, ils comprennent rapidement que vous n’êtes pas d’accord! Je me rappelle cette scène où vos agriculteurs en colère ont bloqué toutes les routes avec des tracteurs, et balancés cinq tonnes de merdes de vaches sur votre parlement, c’était génial! (rires)
Weirdsound : Merci pour cette réponse très complète! Allez une autre : Vous êtes de Sheffield? Vous avez déjà eu l’occasion de croiser ou de bosser avec les Artic Monkeys?
Adrian: A la base je suis de Salford, dans le Lancashire. Je suis né dans le même coin que les écrivains et poètes John Cooper Clarcke et Shelagh Delaney. Puis j’ai été bannis à Sheffield à la fin des années 90, à cause de mon intolérance pour les gens portant des pantalons à pattes d’éléphant, et du fait de mes affinités pour la musique électronique.
J’ai pas le désir, et je ne l’ai jamais eu, de bosser avec les Artic Monkeys. Je préfère encore me découper la bite avec un couteau suisse!
Weirdsound : On a adoré votre chanson sur le Châteauneuf du Pape! Avec la publicité que vous leur avez fait, est ce qu’ils vous ont enfin proposé un sponsoring?
Adrian : Non bordel, et pourtant ils devraient sacrément y penser tu ne crois pas? Les ventes de Chateauneuf ont explosé en Angleterre à cause des fans des Moonlandingz, qui se sont précipités pour acheter leur nouvelle boisson favorite…
Weirdsound : Bon, et sinon? Quand est ce que l’on a la chance de vous revoir en France? Avec les Moonlandingz ou avec un autre groupe d’ailleurs!
Adrian : Si on a de la chance, avant que l’union européenne décide de stopper tous les musiciens anglais d’entrer en Europe…Si on doit foutre quelques murs par terre, de toute façon, on le fera!
Ainsi se termine notre entretien! J’espère que ça vous aura soufflé dans les bronches et donner envie d’aller à la rencontrer de cette joyeuse bande de tarés! En attendant le sortie du deuxième album des Moonlandingz, je vous invite à découvrir la discographie de Adrian avec son groupe Eccentronic Council Research et avec International Teachers of Pop!
Liens :
site officiel de The Moonlandingz : http://themoonlandingz.com/
la page facebook : https://www.facebook.com/themoonlandingz/
Le soundcloud de Eccentronic Council Research : https://soundcloud.com/the_e_r_c
Une galerie photo avec de belles images de concert des Moonlandingz : https://www.gettyimages.co.uk/photos/moonlandingz