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The Harmony Codex ou la recette de la liberté selon Steven Wilson

The Harmony Codex ou la recette de la liberté selon Steven Wilson


En route pour un voyage en wilsonie!

Dans ce nouvel opus solo, le musicien fondateur de Porcupine Tree nous convie à un voyage désorganisé dans son univers progressif. Steven Wilson nous prend par la main pour nous faire visiter la carte de ses obsessions musicales. Nous vous avions précédemment narré les aventures musicales du monsieur (ici). The Harmony Codex, septième album solo, a été conçu entièrement dans le home studio de l’artiste avec l’aide d’amis et collaborateurs de longue date ainsi que des invités. Comme le suggère la pochette du disque, le contenu s’apparente à une randonnée immobile autour d’une myriade de couleurs et de formes qui se construisent et déconstruisent tout au long des 65mn que dure le disque.


Une exploration sans frontière

Ce qui saisit à l’écoute de The Harmony Codex c’est l’incroyable liberté qui règne dans ces paysages sonores. L’artiste ne s’interdit rien et laisse encore une fois libre court à sa créativité, sans aucune bride. Cela donne de formidables moments de déconstruction comme la structure éclatée du très free et parfois floydien Impossible Tightrope et ses dix minutes et quarante quatre secondes de dérives et de rêves musicaux. Des parties soli de sax ou de piano électrique émaillent ce titre à la structure décousue qui vous offre une sorte de vue d’ensemble de l’album. Comme si le musicien vous guidait afin de vous faire gravir le plus haut sommet de son Codex et admirer le relief et la lumière qui le baigne tout autour. Avec ce titre puissant et l’exploration de nouvelles formes, Wilson franchit une frontière, montrant à la fois qu’il ne pense plus avoir quoi que ce soit à prouver, mais également qu’il ne s’impose désormais plus de limite. Parlant du morceau The harmony Codex, l’artiste déclare : « Le morceau ambient de dix minutes au milieu de l’album, sur un album précédent je me serais probablement dit « Tu ne peux pas faire ça. Les gens ne vont pas adhérer. » « 

Il est libre Steven, sur cet Impossible Tightrope, Wilson se libère de Steven. Superbement déstructuré.

De fait, on entre ici dans une dimension quasi cinématographique. En plongeant dans cette composition, j’ai eu l’impression de retrouver l’univers du Blade Runner de Ridley Scott et la magnifique B. O. de Vangelis. Peut-être l’effet des synthés et de la voix narrative… Un travail d’orfèvre du son, une composition qui vous emporte de bout en bout sans jamais pour autant s’envoler ou varier. Superbe.

Le voyage dans l’album avait tout d’abord commencé tout en douceur avec un Inclination aux accents arabisants (et la trompette de Nils Peter Molvear), son rythme électronique tribal programmé par Jack Danger, s’insérant parfaitement sur la mélodie de synthé qui ouvre délicatement l’album. L’atmosphère qui s’installe est une fois de plus totalement onirique. La pureté des sons électroniques utilisés enveloppe tellement l’auditeur que le décollage est immédiat. La voix de Wilson n’arrive qu’après une longue intro de plusieurs minutes et entreprend de vous guider dans les méandres de ce livre de recette harmonique. La progression des titres semble suivre une route tracée et logique, avec une constance dans la très belle production qui évoque un merveilleux voyage guidée dans un univers inconnu. Mais s’il se permet une grande liberté, Steven Wilson ne laisse rien au hasard.

The Harmony Codex, une nouvelle de Wilson

En 2022, l’artiste a sorti une autobiographie en collaboration avec Mick Wall, déjà à l’œuvre sur pas mal d’autres (Ozzy, Maiden…). Si le livre relate surtout le cheminement artistique et musical de Wilson, il contient aussi des fictions. The Harmony Codex est une nouvelle de science-fiction qui clôt le livre.

Crystal Spotlight et le réalisateur Miles Skarin ont travaillé sur la base de la nouvelle de Wilson pour donner vie à ce monde alternatif pour illustrer The harmony Codex

As I was writing the story, I was beginning to develop the initial ideas for this record. It felt logical to have a narrative feel to the songs, to match the cinematic quality of the music. It made sense to write an imaginary soundtrack for that short story, writing music based on its characters and ideas.

Interview au NME, 29 aout 2023

Mais, preuve s’il en est que Wilson, s’il est maniaque et très organisé, ne s’impose aucun cadre, le seul canevas narratif qui pourrait rapprocher le disque d’un concept album se niche dans la progression musicale. En effet, seuls quelques textes se rapportent à la fiction publiée dans sa biographie. Pour le reste, il aborde des thèmes comme le passage du temps (Time is Running Out), la préciosité des petites choses (What Life Brings), ou la beauté dans la malchance et les expériences négatives (Beautiful Scarecrow). C’est aussi le sentiment qu’une mélancolie doucereuse sourd de toute ces compositions qui prédomine à l’écoute. Les envolées ou les cassures rythmiques ou thématiques, mais aussi les solos de guitare de Wilson ou la magnifique participation de la chanteuse israélienne Ninet Tayeb sur Rock Bottom (déjà présente sur To the Bone en 2017) participent de cette sensation qui, loin de diffuser une impression de tristesse, contribuent à rendre l’ensemble fort et attachant. Cela ne va pas non plus sans une certaines part sombre. L’atmosphère de trip-hop à la Tricky qui se dégage d’Actual Brutal Fact est due à la programmation de batterie de Jack danger autant qu’à la voix sous modulée de Wilson— qui n’est pas sans rappeler le débit du célèbre artiste de Bristol—autant qu’à la noirceur du solo de guitare.


Surprendre sans cesse, expérimenter toujours

Pour l’artiste, chaque nouvel opus est une réaction au précédent. Pour The harmony Codex, Wilson admet que peut-être pour la première fois de sa carrière solo, il n’avait aucun agenda, aucune direction musicale pré établie. Il voulait juste un album qui surprenne sans cesse l’auditeur, semer la confusion et le prendre à contre-pied. Il compare d’ailleurs l’album à un tableau de M. C. Escher, le fameux escalier qui a sans doute aussi inspiré J. K. Rowling pour ceux de Poudlard.

Septième album solo de Steven Wilson, fondateur de Porcupine Tree, The Harmony Codex est un petit chef d'œuvre d'orfèvrerie musicale.
Maurits Cornelis Escher, Relativity Lattice, 1953, comme allégorie de The Harmony Codex selon Wilson.

La métaphore est relativement juste, tant on se prend à se perdre dans l’écoute en boucle de l’album. À chaque fois, on a l’impression d’emprunter un chemin différent et on découvre une autre dimension de ce même paysage sonore. Techniquement parlant, le process de création est certainement une des causes de ce son si particulier. Avec la volonté de produire un album résolument différent des autres, le musicien a composé ses titres en ré-injectant les compositions dans un synthétiseur analogique, donnant ainsi à cet opus une couleur différente de ses autres créations.

Le clip de What Life Brings que nous vous avions présenté dans une précédente édition des Clips de la semaine.

Une autre explication à la beauté de la production réside peut-être dans le choix de mixer pour le Dolby Atmos. Pour optimiser l’expérience, l’album a été présenté en avant première à la presse musicale dans un auditorium équipé de soixante neuf hauts parleurs! L’expérience immersive, si elle n’est réservée qu’à de rares privilégiés conviés pour l’occasion ou équipés pour lire de telle œuvres, est certainement un plus et a du jouer un rôle dans la précision et la qualité du mixage.

Peut-être l’album le plus libre de Steven Wilson, en tout cas une œuvre qui repousse les limites de son créateur, sans aucun doute. Mais aussi un des plus beaux albums de cette année, sans aucun doute non plus.


The Harmony Codex est sorti le 29 septembre dernier chez Virgin.


Liens :

https://stevenwilsonhq.com/

https://www.facebook.com/StevenWilsonHQ/

https://www.instagram.com/stevenwilsonhq/


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