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Arnaud Rebotini maître de la musique électro !

Arnaud Rebotini maître de la musique électro !

C’est un visage que l’on n’oublie pas dans le monde de l’électronique à l’échelle nationale. Arnaud Rebotini est probablement au plus haut de son succès après avoir été le premier compositeur de musique électronique récompensé à la cérémonie des Césars. 

Vous le connaissez peut être sous le nom de Black Strobe. Arnaud Rebotini fait ses débuts dans la musique avec son ami Smagghe. Ensemble, ils nous offrent des albums et des maxis rythmés par des notes électro sombres et saupoudrés de sensualité. Leur célèbre titre I’m a man leur donne la gloire, la célébrité et la reconnaissance de l’industrie. Le duo se sépare en 2007. Des larmes tombent auprès de leurs fans mais il n’en est rien chez cet homme si imposant faisant de sa moustache un symbole de son personnage. Arnaud Rebotini poursuit sa carrière solo et se consacre exclusivement sur ses productions personnelles. Il enregistre un excellent album nommé Music Components où seules ses machines analogiques sont mises en valeur. 


Sa musique plaît et dépasse les cases d’un domaine artistique. En 2013, le réalisateur Robin Campillo le sollicite pour réaliser la BO de ses films, Eastern boys en 2013, puis un fameux 120 battements par minute en 2016. Ce dernier est un film magnifique et difficile à la fois qui nous force à réfléchir sur le combat mené face au Sida. Il se voit nommé à Cannes mais également aux Oscars. Au total, c’est bien 12 récompenses et 20 nominations. Arnaud Rebotini décroche lui le César de la meilleure musique originale. 

Suite à ce succès, Arnaud Rebotini est aujourd’hui plus que présent sur la scène électro et s’investit au sein de plusieurs projets artistiques. Entre sa tournée solo, sa tournée avec le Don Van Club, quelques dates avec le spectacle de danse Fix Me, la réalisation de plusieurs BO de films et la préparation de son prochain album… Vous vous doutez bien qu’on voulait le rencontrer ! Et ça tombe bien puisque, après l’avoir vu au Printemps de Bourges, le maître de l’analogique va se produire au Lieu Unique à Nantes. Nous voilà plongés dans les sous-sols de cette ancienne usine de fabrication de biscuits, prêts à interviewer Monsieur Rebotini. 

Arnaud Rebotini et le Don Van Club au Lieu Unique

W : Salut Arnaud ! La première fois que j’entends ton nom c’est en 2007 avec ton titre légendaire I’m a man. A l’époque on était sur du rock électrique. Qu’est-ce que tu retiens de cette période ? Une forme de nostalgie ou pas ? 

Arnaud Rebotini : Non, pas du tout nostalgique car je recommencerai Black Strobe quand j’en aurai envie, et ce qui n’est pas impossible dans l’avenir. Donc j’en garde de bons souvenirs mais c’est pas du tout fini.

W : Ton retour sous le nom de Black Strobe est déjà programmé ? 

Arnaud Rebotini : Non, pas encore, seul mon album solo est programmé.

W : Tu as composé la BO de 2 films (Eastern boys et 120 BPM) pour Robin Campillo. On est curieux de savoir comment s’est déroulé votre rencontre?

Arnaud Rebotini : Il était venu me chercher pour le film Entre les murs mais ça n’a pas abouti. Après, il est venu me revoir pour Eastern boys (2013) et on s’est mis à travailler ensemble. 

W : Potentiellement, est-ce que tu aurais pu faire la musique originale de Entre les murs

Arnaud Rebotini : Oui, mais il n’y a pas de musique à la fin… Le film a bien marché, ils ont eu la totale avec la Palme d’or et le César (Il rit). Donc si t’es pas dedans, tu peux rien dire, ils ont fait du bon boulot.

W : Au niveau du travail, comment ça se passe, c’est un partenariat ? Il te transmet un cahier des charges ? 

Arnaud Rebotini : C’est totalement pour répondre à la demande du réalisateur. En plus Robin est un amateur de musique. Il connaît assez bien ma discographie et ce que je peux lui proposer. Il va donc se servir dans ma grammaire et la musique s’inscrit dans le scénario. Une partie des deux BO a été composée avant le tournage des films respectifs. Pour 120 battements par minute, le thème principal était Scène de club.

W : Il n’y pas eu de retouche après le tournage du film 120 battements par minute

Arnaud Rebotini : Si si, je laisse même à Robin les mains libres car il possède toutes les parties séparées, je lui fais confiance. Il choisit un morceau, une direction, qui est un passage précis du scénario. Ensuite, quand il est en phase de montage, je lui donne le morceau en entier, forcément beaucoup trop long par rapport à la scène dans le film. Comme j’ai pas de timing imposé, c’est assez pratique car moi, je fais un morceau et lui, à l’intérieur de celui-ci, il va prendre le passage qui l’intéresse et même créer un peu de matière puisque je lui laisse les rythmiques et les lignes de basses à part. Bien qu’il ne ré-effectue pas le montage entièrement, s’il a envie qu’il y ait du beat ou pas de beat à tel moment, il peut le faire lors de son montage. 

Quand tu fais du cinéma, il n’y a pas d’ego a avoir.

Arnaud Rebotini

W : C’est perturbant de se faire triturer son morceau ? 

Arnaud Rebotini : Non non pas du tout, il ne triture pas non plus. Je sais plus ce qu’il a fait exactement mais il a la possibilité de remonter la musique lors de son propre montage. Après, en général, les réalisateurs aiment bien avoir de la musique pour pouvoir monter en rythme, c’est pratique. Dans tous les cas, quand tu fais du cinéma, il n’y a pas d’égo à avoir. C’est à dire que ce n’est pas toi le chef. C’est au réalisateur de nous dire s’il aime ou pas la musique. Donc à nous de répondre à la demande. De toute façon, il y a 3 solutions… soit le morceau n’est pas adapté au film mais il est vachement bien, du coup je décide de le garder pour moi, soit il n’est pas bon et on s’en aperçoit un peu plus tard (Il rit), soit il est bon et il va dans le film.

W: En 2018, tu reçois le César de la meilleure musique originale pour le film 120 bpm. Avant de recevoir le prix, on pense à quoi, avant même d’entendre son nom ? 

Arnaud Rebotini : J’étais tétanisé, c’était assez terrible. J’aurais voulu faire autrement mais ça s’est passé comme ça. 

Arnaud Rebotini césarisé pour 10 battements par minute

Le Sida n’est pas qu’un film !

W : Tu clôtures ton discours de remerciements par une phrase qui m’a donné des frissons et qui est bien vraie, « Le sida n’est pas qu’un film« . Ça nous pousse forcément dans une réflexion. Dans les années 90, on ignore cette maladie. En 2000, on en parle enfin et on s’engage pour sensibiliser mais aujourd’hui, en 2019, est-ce qu’on ne serait pas en train de régresser sur le sujet ? 

Arnaud Rebotini : J’ai un peu senti ça aussi à force de faire des interviews. J’avais des amis qui me parlaient des années sida comme si cela n’existait plus aujourd’hui mais y’a plein de gens qui attrapent le sida. Après les gens se disent il y a la trithérapie… On n’en meurt plus. Mais va faire une trithérapie, c’est pas un cachet d’aspirine tous les matins. Les gens ne se rendent pas vraiment compte de cela, ça m’énerve…

Et puis il y a les MST qui reviennent et qui se faisaient rares pendant ces années de prévention. Ce n’est pas qu’un film. J’ai connu des gens identiques aux personnages de ce film qui, d’ailleurs, n’est pas qu’une belle histoire romantique. 

W : Tu aurais pu être un militant Act up dans les années 90 ? 

Arnaud Rebotini : Non, je n’ai jamais été engagé politiquement comme ça. Ce n’est pas une raison mais je ne suis pas gay non plus donc je les ai regardés avec un œil plutôt sympathique. C’est à dire que je suis de la génération qui est rentrée dans la sexualité avec le sida. Lors de la découverte du sida, j’étais encore vierge et donc du coup c’est très anxiogène pour une génération d’arriver avec cette peste moderne. Et je pense que c’est important pour les jeunes de se poser des questions. Alors effectivement, tu ne meurs plus mais le traitement est hyper lourd. Donc pour une histoire de capote…

W : Suite à ce César, ta vie a sûrement changé, t’as gagné en notoriété, tu es encore plus reconnu dans la profession, mais il y a bien un point négatif à ce changement, non? 

Arnaud Rebotini : Non, le César n’a pas réellement changé ma vie. J’ai gagné en notoriété, c’est vrai. On est reconnu par les pairs, c’est ce qui m’a ému mais il faut avoir du recul par rapport à un César. La musique de Eastern boys était tout aussi bien que 120 battements par minute mais je n’ai même pas été nominé. J’ai eu de la chance d’être compris dans un film qui a cartonné, que Robin ait laissé dans le film de l’espace pour 3 clips où la musique est hyper mise en avant donc si tu l’as pas avec tout cela… 

Et la musique est pas trop mal je crois (rire)… Mais il n’y a pas trop de points négatifs à ce prix. 

W : Grâce à cette récompense, tu as senti un effet à l’international ?

Arnaud Rebotini : Non pas à l’international, c’est resté très Français. A l’étranger, tu leur dis que tu as reçu le prix, ils te félicitent et ça s’arrête là. Le film a un peu marché à l’étranger mais pas comme en France. C’était sûrement trop hard pour les Etats-Unis. Le réalisateur de Moonlight (Barry Jenkins) a dit que s’il avait mis autant de sexe dans son film, il n’aurait pas eu l’Oscar. 

BO du film 120 battements par minute composée par Arnaud Rebotini

W : On a eu la chance de te voir au Printemps De Bourges 2019, il y avait 2-3 points qui nous avaient marqués dans ton live. Le premier point, c’est Amandine Robilliard du Don Van Club (la violoncelliste), qui dansait pendant les morceaux. C’est marrant d’avoir ce mélange musique classique et ce côté entrainant ?

Arnaud Rebotini : (Rire) Il n’y a plus de rupture comme avant avec la musique classique. Ceux qui viennent faire ça c’est qu’ils ont envie de faire autre chose que Brahms et Bach. Ils sont comme tout le monde, ils connaissent et aiment la musique. 

W : Sur scène, tu es positionné au milieu des autres artistes, ça donne un effet chef d’orchestre, c’est nouveau pour toi ? 

Arnaud Rebotini : Non je ne suis pas chef d’orchestre, c’est un vrai métier. Là je suis au milieu parce que je suis l’artiste principal et je joue même moins que lorsque je suis solo. 

W : L’autre point, tu as dû avoir, pendant ta tournée, un public généralement assis. C’est perturbant ? 

Arnaud Rebotini : Ça ne me dérange pas vu qu’il y a des longs passages calmes, les gens peuvent être assis. Bourges c’était pas le meilleur public qu’on ait eu. Je pense qu’on a été programmé à la mauvaise heure. 18h, l’heure de l’apéro, dans ce genre de festival, t’as tous les gars qui boivent des coups…  dans une salle enfermée alors qu’il faisait hyper beau… On les a cumulés. 

W : Et sur les autres concerts, le côté feedback, comment tu le vis ? 

Arnaud Rebotini : C’est marrant de les faire se lever et danser. A Lorient, c’est ce qu’il s’est passé et c’était vraiment cool. 

W : Tu as beaucoup de machines sur scène, si je ne me trompe pas tu joues tes lives sans ton PC, tu as un gros travail de mémorisation afin de te repérer entre toutes tes machines, tu te laisses une part d’improvisation et de créativité ?

Arnaud Rebotini : Moins que mon live solo. Là il y a des partitions, on est 8, je ne peux pas tout d’un coup décider de faire 16 mesures de break comme je fais dans mon live. C’est un live fixé. Là je n’ai pas le choix, je suis avec un orchestre avec des partitions mais par contre il y a plein de trucs qui sont improvisés par le groupe comme la façon d’interpréter chaque soir. C’est plus classique. 

https://www.youtube.com/watch?v=w8zAxE4Qfq8
Live de Arnaud Rebotini et du Don Van Club au Philharmonie. Image CultureBox

W : A écouter tes différentes créations entre Black Strobe, résolument électro/rock/clash, les compos de Music Components assez alternatifs puis tes différentes BO dont celles de 120bpm, plutôt classique et ambient, comment as tu évolué dans toutes ces inspirations et créations musicales ?

Arnaud Rebotini : Je ne sais pas comment. Ce sont des envies qui étaient à chaque fois différentes quand j’ai fait ces disques tout simplement. L’idée c’est d’être libre et de ne pas s’enfermer. J’ai eu la chance d’évoluer, changer et de revenir en arrière. Alors oui, parfois j’ai dû perdre des gens… quitte à décevoir mais c’est la vie. 

W : Tu travailles avec des danseurs, des cinéastes ou encore des musiciens, tu nous le prouves ce soir avec le Don Van Club. Du coup, est ce que Arnaud Rebotini a peur de la solitude ? 

Arnaud Rebotini : Non pas du tout. La plupart de mes dates, je les fais en live solo. Quand je travaille, je suis tout le temps seul. En ce moment, la demande d’Alban Richard pour Fix Me fait que j’ai d’autres projets mais je suis souvent tout seul. Après je ne peux pas jouer du violoncelle, de la clarinette… Déjà, pas en même temps, et même pas du tout. (Rire)

Rebotini en live

W : Tu as annoncé la sortie de ton prochain album pour la rentrée 2020. Peux-tu nous dévoiler quelques secrets de cette création ?

Arnaud Rebotini : Je chante sur l’album donc ça se rapproche de Black Strobe mais qui sera beaucoup moins rock et moins blues. Ce sera une couleur qui va se rapprocher des BO que j’ai faites. Un titre house mais c’est tout. Je n’ai pas voulu faire un 120bpm bis.

Je n’ai pas de projet de cinéma. Peut-être que ça va m’arriver et j’aimerais beaucoup !

Arnaud Rebotini

W : Quand on voit des clubs techno parisiens qui ferment, une nouvelle loi votée qui vise à interdire les free party, l’affaire Steve à Nantes ou encore l’expulsion de Mains d’oeuvre… Est-ce que la musique techno – et la culture dans son ensemble – est remise en question ? Y’a-t-il moins de liberté ? 

Arnaud Rebotini : Oui, visiblement. C’est plus compliqué qu’à un certain moment. J’ai participé à un dîner à la mairie de Paris avec Anne Hidalgo, qui est un peu en rupture avec le préfet; c‘est lui qui est un peu remonté, d’où les fermetures administratives qui tombent sur les clubs. Après je ne pense pas qu’il y ait une volonté d’Etat. Le deal, les gens l’ont évoqué, il y a des gens qui prennent de la drogue mais ils sont bien encadrés dans les clubs. Après il y a tout un deal entre la police et ces clubs-là qui est connu. De temps en temps, ils lâchent un nom et ça régule quelque chose qui existe depuis toujours. Je ne pense pas qu’il y ait une volonté du gouvernement mais on sent qu’il y a un recul par rapport à cela. 

W : Ton personnage dégage une image très forte grâce à ta carrure, ton costume et ta moustache. C’est un personnage que l’on est obligé de retenir et forcément, on a envie de te voir dans Peaky Blinders ou un bon polar. Du coup, c’est quand que l’on te voit dans un film ?

Arnaud Rebotini : Je n’ai pas de projet de cinéma. On me le dit souvent. Peut-être que ça va m’arriver et j’aimerais beaucoup. Surement trop vieux… (Rire) 

W : Même avec les réalisateurs avec qui tu bosses ?

Arnaud Rebotini : Avec Robin Campillo, j’ai la place de compositeur, ça fait plusieurs films qu’on fait ensemble et ça me va très bien, je n’en demande pas plus. J’ai la chance d’avoir été choisi par lui pour faire la musique de ses films et c’est un réalisateur que j’adore. Je peux pas tomber mieux. Mais ça me ferait marrer de faire du cinéma à condition que ça ne soit pas trop un cliché, ce serait trop facile.


C’est sur ces paroles que l’on quitte les loges de l’artiste. Nous lui souhaitons un bon concert pour le soir même. Un concert explosif où plus de 1 000 personnes sont attendues au Lieu Unique. Le Don Van Club accompagne l’artiste sur scène où un show de lumière nous est annoncé. On vous en reparle très vite sur weirdsound.net. 


Merci au Lieu Unique pour cette interview.

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