Depuis maintenant plusieurs semaines, le dernier album en date de The Darkness est posé près de ma chaine hifi. Je l’ai écouté une bonne dizaine de fois avant de me décider à écrire quelque chose dessus. Pourquoi un tel manque d’empressement de ma part me direz vous ! D’une part parce que je suis une feignasse patentée, et d’autre part parce que Pinewood Smile, c’est le nom de l’album, demande un peu de temps pour être apprivoisé !
Mais connaissez-vous The Darkness ? J’en vois plusieurs qui se planquent derrière leurs écrans ! Il me semble nécessaire de faire un rapide retour sur la trajectoire de ce groupe, qu’en fait vous connaissez surement ! Avant la fin du prochain paragraphe, vous allez dire : « ah mais oui en fait, c’est ces mecs là ! ».
The Darkness est un groupe de hard rock anglais, qui a vu le jour au début des années 2000, il était initialement composé de Justin Hawkins (chant, guitare), de son frère Dan Hawkins (guitare et chœur), Frankie Poullain (basse et chœur) Ed Graham (batterie). Très rapidement ils rencontrent le succès, notamment grâce à l’album de 2003, Permission to Land, qui s’est écoulé à plus de 1 300 000 exemplaires, porté par des tubes que vous connaissez peut-être comme I Believe in a Thing Called Love :
En 2005, sort un second album One Way Ticket to Hell…and Back, ce second opus ne connaitra pas le même succès que son prédécesseur malgré une production de qualité signée de la part de Roy Thomas Baker (Queen, The Smashing Pumpkins…). Le groupe est alors plongé dans des problématiques de drogues et d’alcool, leur chanteur Justin Hawkins étant « addict » à la cocaïne, en 2006 The Darkness annonce leur séparation.
Entre 2006 et début 2011, les membres du groupe lancent divers projets, qui ne connaitront qu’un succès relatif. En 2007, Dan Hawkins de son côté lancera The Stone Gods, son frère, Justin, formera un groupe en 2008, Hot Leg.
En mars 2011, le groupe finit par se reformer, avec les quatre membres d’origine. Après quelques dates en Angleterre, et une au festival Download, The Darkness part en tournée mondiale, ils croisent le chemin de Lady Gaga, dont ils feront sa première partie pour toutes les dates européennes de la chanteuse.
Le troisième album Hot Cakes, marque le retour en studio de The Darkness à l’été 2012. Les critiques sont bonnes, et les singles Everybody Have a Good Time et Every Inch of You seront un franc succès auprès du public. En 2015 sort Last of Our Kind, le quatrième album du groupe, sur la même période la batterie change de mains puisque c’est Rufus Tiger Taylor qui vient derrière les futs, après le passage anecdotique de Emily Dolan Davies. Rufus est le fils du batteur de Queen, Roger Taylor.
Et on arrive au printemps 2017 où The Darkness annonce la sortie imminente de Pinewood Smile ! Le premier extrait est All The Pretty Girls, chanson sur laquelle nous reviendrons plus tard…Dans la foulée ils font quelques dates en Australie et en Europe, aux côtés de Guns n’Roses, groupe avec lequel The Darkness a de nombreuses connivences musicales. Ils sont actuellement en tournée (ils étaient le 19 novembre dernier au Trabendo à Paris), et vous aurez peut-être l’occasion de les croiser au détour d’une salle de concert ou d’un festival !
Avant de rentrer plus en avant dans l’écoute de Pinewood Smile, il me semble intéressant de tenter de vous donner quelques noms de groupes auxquels j’ai tout de suite pensé après mes premières écoutes : Motley Crue, Gun’s N Roses, Thin Lizzy…ça sent indéniablement le glam rock et les promenades sur Sunset Street au début des années 1980 ! Quid de l’intérêt de proposer ce type de son en 2017 ? Steel Panthers le fait de manière outrageante, mais c’est de la pure parodie (c’est d’ailleurs ce qui les rend sympathiques), quand est-il pour The Darkness ?
Le plus simple est de laisser la parole à Justin Hawkins, qui répond ceci à la question d’un journaliste à la sortie de Pinewood Smile : « Pourquoi les gens devraient s’en soucier ? Parce que s’ils ne le font pas, on est foutus. L’histoire se souviendra de nous comme de cette génération apathique qui a laissé s’installer un climat dystopique et ça ne peut plus durer ! Vous n’en avez peut-être rien à foutre de Trump et du Brexit mais vous devez en avoir quelque chose à foutre de The Darkness, sinon vous serez responsables de la prépondérance d’artistes pop sans saveur ni intérêt. »
L’interview de The Darkness par NME
Forcément vu comme ça…Le mec a sans doute un peu le melon, mais on peut saluer l’effort de vouloir nous offrir un album de rock plein d’humour et de chansons incisives sensé nous sortir de la médiocrité musicale, présupposée, de notre époque ! En tout cas la promesse est super ambitieuse…mais sera-t-elle tenue ? Si vous êtes du genre à faire des recherches sur internet, vous allez vite découvrir que Pinewood Smile reçoit un accueil assez clivant, entre un pitchfork qui les démonte (note de 4.8 : son daté et dépressif…) et un Kerrang! qui les encense (note de 80). Pourquoi cette divergence de points de vue ? Je pense avoir quelques éléments d’explications.
Pinewood Smile a été enregistré au milieu de l’Angleterre, dans les Cornouailles, sous la houlette de Adrian Bushby. Le monsieur n’est pas un débutant, on lui doit plusieurs enregistrements de Muse et des Foo Fighters, pour ne citer qu’eux. L’album commence très fort avec All The Pretty Girls :
Cette chanson, légèrement grivoise, m’a fait immédiatement penser à des hymnes aux jolies nanas comme l’immortel Girls, Girls, Girls de Motley Crue. C’est basique, avec des rythmes et des refrains efficaces et c’est rigolo, que demandez de plus ?
On continue avec Buccaneers Of Hispaniola ! Comme son nom l’indique, c’est une chanson sur la piraterie (pas les mecs qui détournent votre carte bancaire sur internet, ceux qui pillent les bateaux !). Ça sonne très heavy ! Avec quelques ajustements Alestorm aurait crié au plagiat. A mes oreilles cette chanson fait un peu figure d’ovni sur l’album.
Arrive Solid Gold, dire que c’est une chanson caustique sur le statut de rock star est un euphémisme ! Petit extrait des paroles :
We’re immortal
‘Cause our songs will never die
we’re never gonna stop
Shitting out solid gold
Ceux qui ne parlent pas anglais iront sur google trad…C’est dégoutant ! Pour moi c’est une des meilleures chansons de l’album : gros clin d’œil aux années 1980 (voir le clip), riffs costauds qui vont à l’essentiel, refrain débile (quoique) et entêtant…
Je fais l’impasse sur Southern Trains, qui pourrait faire office de classique pour un groupe comme The Darkness, pour aller directement à Japanese Prisoner Of Love, le second morceau atypique de cet album après Buccaneers Of Hispaniola. Justin Hawkins nous y démontre qu’il a une sacrée voix et quelques passages harmoniques viennent jouer les troubles fêtes pour démontrer, si besoin il y a, que les mecs de The Darkness sont quand même de très bons musiciens ! La chanson en elle-même est totalement dingue, Justin l’a composé suite une visite de la prison d’Alcatraz (qui est devenue un musée), où il s’est retrouvé enfermé dans une cellule avec un couple de touristes japonais. S’en suit une digression sur les suprématistes américains et les droits de l’Homme…je vous laisse le soin de découvrir.
Arrive Lay Down With Me, Barbara, morceau difficilement qualifiable ! Musique cubaine ? Hard rock ? Bossa Nova ? Je n’ai toujours pas décidé ! S’en suit I Wish I Was In Heaven, morceau plus calme, qu’on pourrait qualifier de ballade. Ça s’écoute bien, mais je n’en ferai pas des folies. Happiness est un peu du même calibre, avec une intro assez sordide.
Et notre affaire se termine sur Stampede Of Love, morceau assez intéressant avec un rythme très blues et une envolée sur le refrain qui prend bien. L’album dans sa version classique se termine là-dessus, pour ceux qui ont les moyens, la version deluxe comprend quatre titres de plus.
Alors que reste-il au final de ce Pinewood Smile ? Indéniablement un bon album de The Darkness selon moi ! Le groupe était tombé en désuétude pendant la première décennie des années 2000, et les voilà remis en selle, avec visiblement des choses à nous dire. Sur la forme, on pourrait les accuser de repomper les classiques du genre glam et heavy, mais ne faut-il pas y voir un hommage autant qu’une marque de cynisme et d’auto dérision ? Le critique qui a la dent dure pourra rétorquer que ça sent le vieux groupe des années 2000 qui tente de revenir dans la course… Pourtant, et a plusieurs reprises sur cet album, The Darkness s’écarte de leur zone de confort et nous offre des chansons exotiques, sorte d’expérimentations qui prouvent que le groupe est loin d’être mort. Je dirai même que The Darkness se réveille (ça ferait un super titre de film de série B), et on les croisera avec plaisir sur une scène !
Pinewood Smile demande un peu de temps pour être digérer, de par sa construction à travers des morceaux très différents, mélange de kitsch, de classique, de blagues et de nouveautés (je me répète, les types ont quand même mélangé de la musique salsa avec du heavy). Je tiens à remercier Sara pour m’avoir fait parvenir cet album, sans elle je serai sans doute passé à côté !
http://www.thedarknesslive.com/