SAEZ : Putain d’ #humanité !

Encore un album pour le poète maudit français. Un 10 ème opus qu’il me tardait d’écouter. Chacun de ses albums étant une véritable ode à l’amour déchu et à la lutte contemporaine du peuple face au pouvoir sclérosé d’un capitalisme asservissant. En ces temps rudes aux couleurs d’un jaune pétant, un peu de poésie ne fera pas de mal. DAMIEN SAEZ a su nous faire rêver à l’aide de ses vers délicats mais aussi nous révolter en nous balançant en pleine tronche ce que tout le monde (ou presque) pensait à voix basse. 10 albums quasi incontournables tel que Miami, J’Accuse, God Bless ou encore le dernier en date Lulu, en hommage à une France meurtrie par la sauvagerie religieuse extrémiste.
Fidèle à lui même, l’insaisissable chanteur continue de rester très discret dans les médias mais n’oublie pas pour autant ses fans, continuant d’abreuver de sa verve révoltée et saignante l’idéologie saezienne qui est reparti pour un combat contre le terrorisme sous toutes ses formes.

#humanité entre les mains, c’est l’imagerie qui interpelle en premier. Une jeune femme blonde, revolver sur la tempe. Espoir quand tu nous tiens ! Les couleurs sont chaudes et l’ action glaçante. Un oxymore dont SAEZ est coutumier. Il nous avait déjà fait le coup sur l’album J’Accuse où il dénonçait le capitalisme et la consommation à outrance. La jeune femme nue à la plastique parfaite dans un caddie de supermarché en pochette de l’album avait fait scandale. Son passage (un des seuls) dans l’émission « Ce soir ou jamais » pour défendre son manifeste devant les intellos du soir, avait marqué les esprits. Une prose de plusieurs minutes qui a séché les puritains qui s’outraient de voir la pochette en grand format dans le métro. Par contre les filles à poil à la télé et l’industrie de la prostitution ça, il n’y avait pas de problème. Le terrorisme 2.0. Le nihilisme obtus de la société contemporaine exaspère le peuple qui tend à se révolter. La bourgeoisie majoritaire à l’élection de la perdition de l’apprentissage des valeurs qui faisait de nous un peuple libre. L’ abrutissement de masse pour acheter plus de conneries inutiles à la télé. La perdition de la jeunesse qui ne sait plus qui elle doit croire. Qui ne sait plus en quoi croire. La culture sur Twitter est bien loin du siècle des Lumières. « Jeunesse lève-toi ! ». #humanité serait-il la BO de la lutte contre l’esclavage intellectuel ? SAEZ et sa poésie corrosive en est le porte parole.
https://www.youtube.com/watch?v=U2WGuhRKSLk
Pour en revenir à l’album en lui même, les habitués ne seront pas perdus. Textes percutants et instrumentations mélodieuses sont au rendez vous. On pourrait critiquer une certaine redondance dans les structures utilisées et les paroles. Il est vrai que certains titres font très vite penser à d’anciens albums. Mais le combat de DAMIEN SAEZ n’est pas terminé et le message a du mal à passer. Le chanteur est l’un de ces artistes qui « dérange » et est donc boudé par les médias. Ce qui peut se comprendre car chaque passage télévisé se transforme en lutte en direct contre les grands pontes suceurs de dollars. Et qui gère les chaines ? #balancetongourou. Il suffit de regarder la tête que fait NAGUI lors de son dernier passage aux Victoires de la Musique. Un malaise ambiant représentatif de la gravité qui nous mène à la chute nationale.
Deux titres en particulier m’ont vraiment interpellé, de par la qualité des textes et de la musique mais aussi par la puissance et l’impact de l’ensemble qu’ils pourraient avoir dans les cerveaux violés de nos enfants. Ouvrir les yeux en 3 minutes, sniff de C et perfusion dans la veine !
P’tite Pute, rien que le titre pourrait en mettre plus d’un mal à l’aise. Mais ce titre ne fait que mettre en lumière une réalité. Une réalité qui dérange ? Ce n’est que le reflet de ce qu’on nous vend comme le chemin à suivre. Liberté virtuelle ! Une promotion de corps dénudés comme des morceaux de viande chez le boucher. Une jeunesse insouciante des dangers de l’argent, qui suit les chemins de la coke, de la trans. Vendre son cul sur la toile pour un peu plus de popularité, prendre modèle sur des poupées plastique pour un peu plus de pouces levés. Certes l’image que renvoie SAEZ sur notre société n’est pas des plus rose. Mais est elle pour autant complètement fausse ? En écoutant l’album, un épisode de la série BLACK MIRROR m’est revenu en tête. On y suit la dégringolade d’une femme dans une société qui ne vit qu’ exclusivement à travers les « likes » des gens qui l’entourent. Une monnaie d’étoiles qui nous dicte comment vivre. Tu es populaire alors accède à ce que tu veux Le contraire est moins glamour.
« Au gré des pouces levés la jeunesse s’est paumée […] Elle a les yeux qui chialent mais le cul qui dit oui, à qui mettra les voiles avec elle pour une nuit. »
D.SAEZ – La Belle au Bois
La Belle au Bois sort un peu du registre musical du poète. Un titre plus électro qui rappelle la période God Bless avec des titres comme Sexe. On y suit la vie nocturne d’une jeune adolescente qui cherche à tout prix à s’éloigner de la monotonie et de la tristesse d’une vie banale passée au travers des écrans. Une vie connectée faite pour crever isolé. Un je-m’en-foutisme du conséquentialisme. Envoyer tout dans les chiottes c’est le prix pour rêver.
Un son presque 80’ pour accompagner la décadence du dernier espoir. Un espoir sous Valium et anti-dépresseur. Un 99F auditif.
« Elle gobera tout ce qui bouge tant que ça fait planer
Quand le coeur est dans le rouge, c’est d’avoir trop saigné
Elle sucera dans les chiottes n’importe quel enculé
Taillera des pipes a qui pourra la faire rêver. »
D.SAEZ – La Belle au Bois
Lorsque les gens me disent qu’ils n’aiment pas SAEZ, c’est généralement à cause de sa voix. Je ne dirais rien car j’étais dans le même cas il n’y a pas si longtemps. Mais le concert qu’il a donné lors de son dernier passage à Nantes m’a littéralement scotché. Plus de 4 heures de spectacle ! Qui est capable d’une telle prouesse ! De quoi rattraper l’heure et demi de retard. Ça c’est rock’n roll ! J’avais du mal avec sa voix qui était pour moi un peu criarde. Mais cela fait partie d’un tout. C’est le versant punk qui transcende son art. Son coté « extrême » et la violence de ses mots peuvent choquer. Mais il ne faut pas oublier que notre chanteur saltimbanque manie les mots comme un couteau aiguisé. Avec une précision de couturière il entonne et enchaîne les mots dans un lyrisme exacerbé. Il est pour ma part l’un de nos grands paroliers. Bien que les idées soit tranchées, l’amour est au centre de tout. Nous en avons besoin et cela fait du bien lorsque nous sommes assommés à longueur de journée par des « Paname, Paname on arrive … » ou des « J’aimerais être la chaise sur laquelle elle s’assoit … ». Une bouffée d’oxygène littéraire dans un monde de banalités perverties. Ces artistes qui se moquent du nombre de ventes ou du nombre de parutions télévisées me semblent trop rares. Du moins dans la variété française. Rien que ça, déjà, entendre des textes travaillés en français… Où sont passés nos BREL ou nos FERRÉ. SAEZ fait partie de ceux là. Comme une sorte de Justice League de la beauté. Un Artiste qui se fout du flouze et qui nous chante chaque mot avec ses tripes. La musique en elle même est aussi une véritable délectation. On peut profiter du musicien sans prendre partie. Un panel de styles tous plus changeants les uns que les autres. Les amoureux de la guitare sauront satisfaire leur appétit.
Pour tout ceux qui n’ont pas eu encore l’opportunité d’écouter quelques albums de SAEZ, allez y sans appréhension et sans jugement. Laissez vous aller car ce qui est sûr, c’est que l’artiste sait y faire avec les mots. La beauté mélancolique d’un amour échappé saura vous faire voyager en des sentiments déjà traversés. Les chansons de SAEZ ne sont pas que de simples chansons. Ce sont des instants de vie. Ce sont les après midi d’hiver seul ou accompagné. Ce sont ces soirées que nous avons tous un jour pu regretter. Ce sont les personnes que nous n’avons pas su aimé. Ce sont ces amours que nous n’avons pas osé. C’est une révolte, un combat, la passion, la grâce, la poésie, la Liberté… c’est la Vie.
Si j’ai donc un conseil à vous faire, glissez une oreille sur le dernier album de SAEZ #humanité (Humanité / Les guerres des Mondes / La Mort / J’envoie / P’tite Pute / La Belle au Bois / Amour Criminel / Elle aimait se faire liker / L’ Attentat / Burqa / Ma Religieuse) et sur sa discographie complète. Il y aura forcément un titre qui vous fera dresser les poils sur les bras, dresser le poing ou même autre chose.
Alors à toi jeunesse oubliée, à toi l’ami qui s’est fait licencier, à toi la putain des beaux quartiers, à toi le père destitué, à toi mon frère de sang et à tous nos enfants. A toi peuple manifestant. A notre futur suicidé, au combat qui sera toujours mené. Alors allez y scandez, enfants de la patrie, scandez ce putain d’hymne #humanité.
Peace & Love !
« N’EST MAÎTRE DE SON ART QUE CELUI QUI LE CRÉER. »
Damien SAEZ
Sans doute le texte le plus juste que j’ai lu sur Damien Saez. Un chanteur qui m’est indispensable par ses mots, ses cris, ses colères. Il lui arrive de tourner en boucle mais l’immensité de certaines de ses chansons est juste une ode incroyable à la poésie des écorchés vifs.
Merci à vous! Ce genre de retour ça aide à bien démarrer la journée !
Merci ! Il est vrai que c’est toujours agréable !