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Nick Cave: la  sublime souffrance de Ghosteen

Nick Cave: la sublime souffrance de Ghosteen

Je suis un fan de Nick Cave depuis longtemps et le rockeur à la voix caverneuse sépulcrale nous a habitués dans certains titres, ou albums comme Murder Ballads en 1996, à ne pas sauter ou danser et plutôt à une douce mélancolie empreinte de tristesse à leur écoute tout en nous illuminant aussi par leur beauté. Avec Push the Sky away, en 2013, superbe album enregistré dans le sud de la France, Nick Cave semblait amorcer une mue, en compagnie de son fidèle lieutenant Warren Ellis: les sons synthétiques et atmosphériques commençaient à prendre le pas sur les guitares et le Nick Cave plus rock. L’album Skeleton Tree, bien que composé en grande partie avant la mort tragique de son fils Arthur, en Juillet 2015, à Brighton, était d’autant plus magnifique et tragique qu’il paraissait à l’aune de ce deuil et qu’il était accompagné d’un non moins bouleversant film documentaire, One More Time with feeling, projeté la veille de la sortie de l’album. L’album Ghosteen, 17ème album de Nick Cave, qui sort ce vendredi 8 Novembre 2019, pourrait apparaître comme le dernier maillon d’une trilogie, sauf qu’il est, totalement, l’album du deuil difficile et douloureux.

L’album au titre déjà glaçant, Ghosteen pouvant se traduire par l’adolescent fantôme, peut être appréhendé comme une oeuvre quasi classique composée de 2 temps forts (cf les 2 volumes, en vinyle comme en cd): une 1ère partie (avec 8 titres), décrite par Nick Cave comme « Les Enfants » et la seconde, avec 2 longs titres, « Les parents ». Dès le 1er titre , « Spinning song« , le ton de l’album est donné: nappes de synthé pour une atmosphère brumeuse où la tension est déjà palpable: la voix de Nick Cave va nous immerger dans celle ci pendant plus d’une heure en commençant à psalmodier des paroles dont la résonnance nous met mal à l’aise… »I love you » puis voix plaintive accompagnée de choeurs pour déclamer « Peace will come..a peace will come in time »….et l’on sait que cette paix sera longue, voire impossible à retrouver.

L’intensité de l’émotion va être omniprésente tout au long de l’album, renforcée aussi par des arrangements souvent minimalistes: même si les mélodies peuvent apparaître parfois monocordes, rompues par une guitare, une basse ou des choeurs, pas de monotonie tellement l’album apparaît comme une symphonie hommage à la gloire de l’adolescent absent, Ghosteen. dans « Waiting for you », Nick Cave s’adresse à son fils: « I’m waiting for you…to return »..j’attends que tu reviennes…puis dans « Ghosteen speaks » , « je suis à côté de toi, tu es à côté de moi..cherche moi ».

La deuxième partie de l’album n’apportera pas l’espoir de voir Nick Cave arriver à surmonter son immense peine. dans le titre éponyme, « Ghosteen« , il évoque toujours « le fantôme de l’ado (qui) …danse dans ma main ».. « bébé ours n’est plus là, il a pris un navire pour la lune ». On mesure l’impuissance d’un père: « si je pouvais secouer la nuit, je le ferais ».

Un final bouleversant, reflet d’un album d’une rare beauté.

Sur le titre final, « Hollywood« , Nick Cave continue de nous bouleverser. Il emprunte une parabole bouddhiste, celle de Kisa (Gotami) et la graine de moutarde. Après avoir perdu son enfant et desespérée, un vieil homme lui conseille d’aller voir Buddha…Celui ci lui dit d’aller voir les villageois pour ramasser des graines de moutarde et il pourrait ramener son enfant à la vie, mais à condition que cette collecte ait lieu dans une maison où la mort n’a jamais frappé… Mais cette quête se révéla impossible…Après avoir chanté, d’une voix de falsetto capable de nous arracher des larmes « It’s a long way to find peace of mind », Nick Cave doit admettre que « Everybody’s losing someone »…que tout le monde a perdu quelqu’un, un être cher. La fin de de l’album et du titre nous serre la gorge: « I’m just waiting now for my time to come »…pour retrouver son fils.

Certains penseront peut-être que Nick Cave en fait trop, qu’il y a trop de pathos (?) mais Nick Cave a le courage de se mettre à nu comme, sans doute, peu d’artistes pourraient le faire . Ghosteen est l’album du deuil et de la catharsis (comme le très bel album de Sufjan Stevens, Carrie & Lowell, en 2015 où S.Stevens rendait un hommage à sa mère) délivrant un message universel quant à la mort. Mais un album qui « essaie de redonner vie à son fils disparu » (phrase empruntée à Rebecca Manzoni de France Inter!).

Nick Cave a, peut-être, réalisé son chef d’oeuvre, le plus bel album de sa carrière, de l’année et dont on parlera sans doute longtemps. Nick Cave sera en concert pour 2 dates en France au printemps 2020.

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