Fool, un album haut en couleur

Fool, un album haut en couleur
joe-jackson nouvel album fool

Le 18  janvier paraissait  Fool, le nouvel album de Joe Jackson, ce qui n’était pas sans réjouir nombre de ses admirateurs.

La date n’était pas moins importante puisqu’il s’agissait également de celle qui marque les quarante ans de carrière de l’Artiste. De nombreuses années dédiées à la musique, et qui auront vu naître de multiples albums au sein desquels Joe Jackson expérimente plusieurs styles  tels que le jazz, le punk ..

Cette œuvre prolifique témoigne d’une certaine capacité à capter avec justesse l’essence du monde dans lequel il évolue, afin de le retranscrire avec précision et élégance, ponctués de métaphores et de rifts de guitare envoûtants.

Joe Jackson
Joe Jackson

Le  titre qui a été choisi laisse à penser au fou du roi, personnage fantasque et haut en couleur qui évolue au sein des huit titres qui composent l’album.  Tous ont pour fil conducteur le temps qui passe et sur lequel personne n’a de réel pouvoir si ce n’est celui de casser sa monotonie.

Dès le premier morceau, intitulé Big Black Cloud, Joe Jackson donne le ton en incitant son auditeur à se plonger dans le tréfonds de la pensée luxuriante de son personnage qui pourrait également revêtir les traits propres aux supers héros.

Même si les paroles, lors de la première écoute, peuvent  paraître  sombres, l’artiste semble ici exorciser la morosité du quotidien pour se plonger dans un monde fantastique. L’instrumental insuffle d’ailleurs un vent de changement, naviguant entre les styles rock des années 60, en passant par des notes plus radicales faisant penser à la New Wave qui revêt rapidement des accents pop.

« No luck, no Money, no sex, no fun

Get on the treadmill and run and run »

Contraste avec l’expression   sex drug and rock’n’roll  qui pourrait alors être ressentie comme une idée de déconstruction du monde moderne qui est ici réinventé.

Dans ce premier morceau, nous perdons tous repères aussi bien spatiaux que temporels.

La seconde chanson,  Fabulously Absolute, semble être essentielle à l’album puisqu’elle est celle donnant corps à la figure du personnage central, qui pourrait être perçu comme un homme aux milles visages partageant les tares de la société humaine dont il ne semblait pourtant pas être destiné à partager les traits.  A l’écoute de cette seconde composition, un certain enchantement s’opère et se pose comme un voile sur les imperfections du monde, de manière à les enjoliver, tel le fou s’exécutant devant le roi pour le sortir de son quotidien morose et mercantile.  A cela s’ajoute l’idée d’une quête intérieure, l’homme semblant se trouver sur le chemin de la vie. Le  rythme se fait aussi répétitif que celui des aiguilles d’une montre  qui ont commencée à faire le tour du cadran  et inspire un cynisme notable à Joe Jackson lorsque ce dernier s’adresse  à un être immatériel :

« Tell me what I want

Tell me what I feel

So fabulously  absolute »

Dave est une chanson plus légère, et fera peut être penser  à la mélodie également présente dans les compositions des Beatles. Tout cela est propice à insuffler un vent de nostalgie…

Dave est également un personnage coupé du monde et se contente de choses simples tandis que d’autres courent après la gloire sans tenir compte du temps qui passe. La vie ne pourrait-elle pas être perçue ici comme un éternel recommencement ?

« Dave lies in his grave

Under the hill, somebody took his place

With the same face

Whistles the same tone-deaf tune

Works until noon, howls at the moon

Maybe he’ll call in sick

Head like a brick

Says you can just

Call him Dave »

Les notes d’introduction au piano de Strange Land  en contredisent le titre en nous entraînant dans un univers semblant apaisé.

Dès les premières notes les paroles font référence aux cartes à travers lesquelles nous pourrions voir la métaphore de la destinée.  Serait-ce également un clin d’œil à Friend Better ? En effet, sur la pochette du single contenant ce même titre Joe Jackson apparaît une carte à la main qu’il colle à son œil. Et si chacun connait l’adage rappelant que les yeux sont  le miroir de l’âme, nul doute que celle de Joe Jackson est restée résolument moderne et libre. La carte n’est en effet pas choisie au hasard, puisque il  s’agit de la seule ne contenant aucun numéro et qui représente le fou. Que ce soit celui du roi ou l’évocation de la folie douce et  de la passion, Strange Land et Friend better ne seraient elles pas toutes les deux le symbole d’une errance dont l’homme ne pourrait être extirpé que par une rencontre, et de l’envoûtement qui en résulte semblable à l’ivresse ?

A travers ce nouvel album, Joe Jackson  réussit à prouver que rien n’est invisible y compris le temps  qui passe : il n’aura en effet pas réussi à user sa voix, qui nous parait aussi claire que dans ses premières interprétations.

Ce qui nous intéresse ici également, c’est l’évolution du personnage et la cohérence avec laquelle l’Artiste le fait évoluer dans ses titres. C’est une invitation au voyage, à la curiosité du monde qui nous entoure mais également à  l’altruisme.  Néanmoins l’idée de travestissement est omniprésente, comme si le masque que revêt l’homme créateur  avait été jeté sur les yeux du monde.

La chanson éponyme, Fool, revêt des notes étrangement agressives. Mais c’est aussi cela qui caractérise l’œuvre de Joe Jackson : la capacité de naviguer entre les mondes et les sonorités diverses au sein de ses morceaux comme en témoigne 32 Kisses.

Dire que les notes alternent entre tragédie et joyeuseté serait un euphémisme. Mais notre attention est portée sur le chiffre en lui-même : 32, symbole de la dualité et de l’équilibre, deux caractéristiques si propres à l’homme.  Il est également celui des cases  qui composent le plateau du jeu d’échec : 32 cases noires et 32 cases blanches…. L’Artiste met en effet en scène son personnage sur une scène qui pourrait être assimilée à l’échiquier dont le noir et le blanc aspirent et réfléchissent les états d’âme et les événements divers rencontrés au cours de l’existence.

Alchemy est le morceau qui clôture l’album, abaissant les rideaux sur le mystère contenu dans les huit titres et qui reste non élucidé, si ce n’est pour ceux dont les paroles feront écho à des souvenirs jalousement conservés. Peut être est ce cela, le véritable pouvoir de la Musique : savoir lever le voile sur les méandres de l’âme sans trop les exposer au grand jour, par crainte de les consumer.

Avatar

Golden Rock

Étudiante en histoire de l'Art et envoutée par les accords mélodieux de Jimmy Page depuis son plus jeune âge, c'est avec plaisir qu'elle s'efforce de faire découvrir à travers quelques lignes les artistes qui ont attisé ma curiosité et ravi mes oreilles!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *