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Du fond des âges : Heilung, les racines de la musique

Du fond des âges : Heilung, les racines de la musique

En Allemand, Heilung veux dire guérir. Guérir par la musique, retrouver l’essence des choses, guérir du monde actuel. La musicothérapie prend ses racines chez les grecs anciens qui associaient l’art de la musique aux mathématiques et à la médecine. L’humeur, ou les humeurs, pouvait être influencée par l’écoute de tel ou tel instrument, sur des rythmes appropriés.

Les pythagoriciens ont élaboré un concept, la musique des sphères, qui place le corps humain au centre d’un système géocentrique où les distances entre les planètes sont des intervalles mathématiques qui correspondent à des intervalles musicaux. C’est une harmonie du cosmos dans le sens large du terme, où la mise en résonance des corps permet leur guérison. Les chinois associaient les éléments à des sons eux même identifiés comme correspondant à des parties du corps humain, et, selon la philosophie taoïste, les intervalles étaient ce qui portait le souffle créateur.

Plus loin de nous encore, les premiers Homo-Sapiens, mais aussi peut-être Neandertal, qui nous ont précédés il y a 35 à 40 000 ans, pratiquaient déjà la musique. Les traces sonores sont éparpillées dans le vent du temps. Mais de nombreux instruments ont été retrouvés. Des témoignages visuels sur le mur des grottes, des os taillés, des morceaux de bois attestent de la pratique musicale chez nos lointains ancêtres. Des chercheurs ont récemment recréé les sonorités supposées de ces instruments, et ont tenté de redonner vie à cette musique dont les échos se sont tus depuis des millénaires. En 2014, avec l’aide de l’Orchestre National de France, ces membres du Muséum d’Histoire Naturelle, donnaient un concert sur des instruments datant d’il y a 4 000 ans.

La plus vieille trace de musique écrite a été retrouvée en Syrie, à Ugarit, et date d’il y a  1400 ans. C’est un chant de fertilité, invoquant la déesse Nikkal. Sur la tablette se trouvent également des indications musicales : intervalles rythmiques, mode…

Les premières expérimentations contemporaines de musicothérapie sont attestées au XIXè siècle au Canada. Au cours du XXè siècle, différents courants se développent dont le but est tout autant de soigner le corps, que de guérir les âmes.

La démarche d’Heilung est de faire renaitre une musique qui pré-existait à l’ère chrétienne, et de dispenser un remède sonore aux maux de notre époque. Les paroles sont des extraits de textes runiques, trouvés sur des pierres gravées, des manches de lance ou encore des amulettes, qui sont soit ré-interprétés, soit livrés in extenso sur une musique où l’intervention des instruments électriques est réduite à son strict minimum. Les musiciens utilisent des éléments organiques ou métalliques, tels des tambours de peau, des ossements humains, des pièces anciennes (épées, boucliers…), ou encore le bruit de l’eau. Les membres du collectif font revivre ces sons oubliés en les interprétant revêtus de peaux de bêtes, de coiffes ornées de bois ou de crânes, et se mettent en scène dans une ambiance de rites païens pourtant apaisante.

L’imagerie qui accompagne ce type de spectacle, ainsi que ce type même de démarche, est aujourd’hui largement connotée et suspectée de véhiculer une idéologie crypto-fasciste. À vrai dire, à la découverte du groupe, j’ai eu une certaine appréhension, une peur de retrouver leur musique sur des sites identitaires, se revendiquant comme des gardiens d’une tradition occidentale qui s’opposerait à toutes les autres. Mais non, rien de tel chez Heilung. Nulle démarche identitaire ici. Nulle revendication d’une culture supérieure, occidentale ou autre. Au contraire, il y a plutôt une hybridation entre une volonté de recherche musicale, ethnographique et l’envie de diffuser une sensation de bien-être à l’auditoire en le reconnectant avec sa nature profonde. La profession de foi que le groupe déclame avant tout récital atteste d’ailleurs de sa volonté de rassembler.

Remember, that we all are brothers
All people, beasts, trees and stone and wind
We all descend from the one great being
That was always there
Before people lived and named it
Before the first seed sprouted

Rappelons-nous que nous sommes tous frêres

Tous les peuples, animaux, arbres et pierres et le vent

Nous descendons tous de l’Être Unique

Qui fut toujours là

Avant que les peuples ne vivent et ne le nomme

Avant que la première graine ne pousse

Comme pour désamorcer toute récupération, ils précisent sur leur chaine Youtube et sur Facebook :

« Heilung est une histoire sonore de l’âge de fer de l’Europe du Nord et ne doit pas être confondu avec un message politique ou religieux d’aucune sorte. »

C’est donc bien à un voyage méditatif qui veut nous remettre en harmonie avec l’essence même du monde dans un esprit de transe chamanique que nous convie le groupe. Les voix se mélangent, des cris guerriers aux incantations de prêtresses aux gestes langoureux, ponctués de cris d’animaux, lancinants, les rythmes, martelés sur des tambours et des percussions organiques nous invitent à la transe. Nous sommes soudainement plongés dans les âges indistincts, où l’Histoire n’est pas encore écrite, et où les rites païens invoquent encore les forces cachées de la Terre. Ce sont des images fugaces de l’ « Excalibur » de John Boormann, des odeurs d’humus, ou le contact d’éléments primaires comme l’eau, le feu, la terre… qu’évoquent cette musique.

Heilung semble reprendre le flambeau là où Dead Can Dance l’avait laissé avec « The Serpent’s egg » ou « Aion»[1] approfondissant la démarche jusqu’à retrouver les pulsions premières de la création musicale.

L’album « Lifa » retransmet sur support numérique l’expérience physique que fut la présentation scénique live de leur premier album « Ofnir ». En regardant l’intégralité du show, on ne peut que deviner ce qu’on put ressentir les personnes présentes dans le public lors de ce concert hors norme. On y voit défiler les ombres d’une humanité qui ne s’est pas encore extraite de l’ensemble du vivant, on y croise des anciennes divinités, des guerriers, des chamans…

Le projet est mené par Christopher Juul, musicien norvégien touche-à-tout, qui s’est entouré de Maria Franz, chanteuse au sein de son groupe électro-pop norvégien-danois Euzen, et de Kai Uwe Faust, spécialiste du tatouage traditionnel inuit, scandinave, et plus largement ethnique du monde entier.

AVIS aux amateurs! Heilung sera au Hellfest de Clisson en Juin 2018!(le 23?)

Leurs 2 albums, « Ofnir » (2015) et « Lifa » (album live de 2017) vont sortir chez le label marseillais Season of Mist en Avril prochain.

[1]Bien que cet album, au contraire de la démarche d’Heilung, s’inspire des Chants de la Sybille, composition chrétienne catalane du Xè siècle.

https://www.hominides.com/html/dossiers/musique-prehistoire.php

https://www.francemusique.fr/musique-classique/paleomusique-un-concert-sur-les-instruments-vieux-de-10-000-ans-2508

https://heilung.bandcamp.com/

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