Beyries, artiste québécoise, sort son deuxième album, Encounter, ce 13 Novembre, sur le label Bonsound. C’est l’occasion pour weirdsound de vous faire découvrir, sans doute, cette artiste encore peu connue en France, 3 ans après son premier opus, Landing.
Malade et sans travail, Beyries (re) découvre sa voix et sort un premier album
Amélie Beyries est montréalaise et son parcours musical récent s’apparente à un coup du destin. Après divers petits boulots, Beyries travaille dans le domaine des relations publiques lorsqu’à 28 ans, en 2008, on lui diagnostique un premier cancer. Pendant son traitement, elle commence à écrire des chansons pour y traduire ses émotions. Beyries composait cependant des chansons dans son plus jeune âge alors qu’elle vivait à Outremont, quartier résidentiel de Montréal. Elle jouait alors-déjà- sur le piano de sa grand-mère, un Heintzman & Co de 1923, le fabriquant installé à Toronto entre 1886 et 1978.
Heureusement, après une récidive de cancer en 2010, Amélie Beyries a une amie fidèle qui croit en elle et en son talent musical. C’est cette amie, Emmanuelle, qui va proposer les maquettes de Beyries notamment à Alex Mc Mahon, un ami producteur. Celui ci ne savait cependant pas, dans un premier temps, qu’il écoutait les chansons de Beyries, dont l’identité lui avait été volontairement masquée. Il pouvait ainsi rester objectif dans sa critique ! Beyries, dans une ITV au magazine canadien L’Actualité, en Février 2017, reconnaît avoir été ainsi (ré)confortée : « Quand il a appris que c’était moi, il n’en revenait pas… S’il acceptait de travailler avec moi, c’est que je n’avais pas le choix. C’était un signe de la vie« .
Le coup de pouce du destin, partant d’un évènement grave, va finalement déboucher, de façon heureuse, sur un album, Landing.
Beyries est francophone mais tous les titres de cet album sont en en anglais, à l’exception du très beau J’aurai 100 ans. C’est un duo avec un autre québécois, Louis Jean Cormier, dévoilé dès l’automne 2016. D’emblée, on est séduit par la voix et la musique où se combinent douceur et puissance. L’album Landing, paru en Février 2017, n’est pas sans lendemain car les concerts de Beyries vont aussi dévoiler une artiste qui sait toucher son auditoire. Elle enchaîne 150 concerts à travers le monde, entre Londres, Paris, Los Angeles et Istanbul où se constitue un noyau dur de fans.
En 2018, un E.P de 5 titres va ravir le public francophone. Outre la reprise de J’aurai 100 ans, il propose d’autres beaux titres comme Je Pars à L’autre Bout Du Monde ou Au Delà Des Mots. A découvrir aussi !
Encounter, un album de rencontres et d’intimité avec Beyries
L’album Encounter devait paraître en Février mais, Covid oblige, il a pris beaucoup de retard. La Covid et ses dommages collatéraux mondiaux nous ont tous fait prendre conscience d’une certaine fragilité de la vie. A 40 ans et compte tenu de son vécu personnel, Beyries en sait quelque chose. Il y a quelques jours, dans une ITV au quotidien québécois, Le Devoir, elle déclarait : »Il y a un découragement et un espoir en même temps. La menace commune nous rassemble et nous distancie. On est confronté à nos contradictions« .
Dans son album Encounter, Beyries nous fait entrer dans son intimité d’autant que ses compositions musicales nous donnent l’impression de nous envelopper. Dans l’ITV précitée au Devoir, Beyries nous fait partager son ressenti d’aujourd’hui, perceptible dans l’album. « Il y a des côtés agréables et des côtés troublants à regarder la vie en face, mais aller à la rencontre de soi est le meilleur révélateur. Je me suis réfugiée dans la musique pour me sauver, mais en faisant ça je me suis trouvée et je n’ai plus peur, ni de la vie, ni de la mort« . Puis elle ajoute ce qui pourrait apparaître comme une proposition de philosophie de vie : « Je n’ai même plus peur d’avoir peur. Et ça, c’est extrêmement rassurant. Je ne sais pas combien de temps j’ai devant moi, mais ce que je sais, c’est que je le prends, mon temps« .
Réflexion à rapprocher de celle proposée par le dernier très bel album de Tunng.
L’album est une rencontre de l’artiste avec elle même mais aussi avec les autres. Il a été composé sur le vieux piano familial restauré. Celui ci va bien sûr très souvent être mis en évidence sur de nombreux titres de Encounter.
Encounter, l’album de Beyries réconfortant avant l’hiver.
L’album s’ouvre sur What We Have, un titre déjà très beau…et cela ne sera pas le dernier ! Une guitare acoustique très pure puis une voix aérienne nous emporte avec un léger écho. « Mon Amour, je suis entrain de rebâtir sur ce que nous avons » chante d’abord Beyries avant que l’optimisme ne retombe : « Mon Amour, je ne peux continuer, l’espoir s’est évanoui ». On remarque aussi une belle basse discrète et efficace à la fois que nous retrouverons dans de nombreux titres. On enchaîne avec Closely, titre très épuré. Guitare/voix seulement puis 2ème voix et petite nappe d’orgue avant que le piano ne se surajoute. De belles harmonies avant une fin de titre qui peut laisser une place à l’évasion sur un piano sautillant addictif.
Sur Over Me, le clavier prend, d’emblée, le dessus. Rythme plus pêchu et titre plus enlevé avec de belles harmonies vocales et des riffs de guitare. Un titre qui donne envie de danser, de vivre-déconfiné. Tant Mieux ! Sur Keep It to Yourself, basse et clavier se répondent tandis que Beyries commence à chanter. Titre plus pop qui décolle dans une ambiance sonore cinématographique des 50’s/60’s. Une orchestration très riche que l’on retrouve aussi dans Into You qui débute pourtant sobrement avec le couple piano/voix. La basse nous propose à nouveau de beaux motifs.
Out of Touch est l’un de mes titres préférés. Piano et voix aérienne avec écho nous enveloppent puis les cordes nous emmènent encore un peu plus loin avant un final très dépouillé. Graceless est très court mais le titre nous surprend par sa couleur musicale. Folk puis parfum soul gospel pour un titre enlevé en forme d’hymne et de dénonciation. Dénonciation des guerres, des dictateurs, des croyants aveugles. Une chanson où Beyries se demande « combien de marches de plus (faudra t-il) à Kiev » ou « Combien de murs de plus allons nous construire« ……. »Are we coming together » s’interroge t-elle. Très beau clip, à nouveau signé Raphaëlle Chauvin, à voir en bas de cet article.
Un final éblouissant et enveloppant
The Story of Eva nous permet une pause cool dans un premier temps. Calme trompeur car des riffs de guitare viennent nous surprendre puis piano et voix semblent reprendre leurs droits avant une nouvelle envolée ! Les deux titres suivants sont superbes. Great Green Eyes renoue avec le coktail riche orchestration/harmonies vocales pour nous embarquer très haut. Nous Sommes est, comme sur l’album précédent, le seul titre en français. D’abord épuré, avec juste quelques arpèges de guitare et la voix de Beyries, il a tout pour nous séduire. Là encore, passé la première minute, la richesse instrumentale nous confirme la maîtrise de Beyries. En moins de 2 minutes, Anymore clôt l’album en douceur.