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Souls at Zero de Neurosis : les fondations d’un genre

Souls at Zero de Neurosis : les fondations d’un genre

Then we said, OK – this is going to take us to where we wanna go: somewhere deeper, somewhere more emotional, somewhere elemental.

Puis nous nous sommes dit, d’accord — cela va nous emmener là où nous voulons aller : un endroit plus profond, plus émotionnel, plus élémentaire.

Steve Von Till, The Guardian, 2 décembre 2010

Il est des expériences que l’on n’oublie jamais. Et que l’on aimerait pouvoir répéter indéfiniment. C’est souvent le cas des moments marquants de l’enfance ou de l’adolescence, et il en va de même des films, des livres comme des albums. Le temps passe et ces sensations s’estompent, se transforment. Ce n’est pas l’objet qui change, mais la perception que vous en avez, la mise en perspective de deux histoire parallèles : la votre et celle du sujet. Cela vous donne la mesure de votre évolution, mais aussi de celle de l’Histoire qui accompagne le temps de votre vie. En 1992, Souls At Zero était un objet mal identifié qui tournait sur une TDK de 90mn et provoquait des frissons et des émotions fortes à chaque écoute. Mais il restait seul dans sa catégorie au sein de ma « cassettothèque » qui partit en fumée un jour de septembre 2013. En 2020, c’est devenu un marqueur. Enfin identifié, il est cette pierre angulaire d’un style musical, ce moment de surgissement de quelque chose qui n’a jamais été fait mais qui a fait école depuis. L’histoire musicale s’est écrite et a imposé cet album comme acte fondateur du Post-Metal.

Si certains groupes aveint posé des bases, Souls At Zero, le troisième album de Neurosis sorti en 1992, est le moment fondateur d'un genre : le Post-Metal.

Le basculement

L’aube d’une ère nouvelle

Ce troisième album des californiens de Neurosis marquait en effet le commencement d’une ère nouvelle dans le genre. Sorti en 1992 sur Alternative Tentacle, le label de Jello Biafra, mixé par le chanteur des Dead Kennedys lui-même, le disque sortait les jeunes musiciens d’Oakland de leur confortable punk-hardcore pour les projeter dans un univers musical plus spirituel, plus complexe, plus violent peut-être encore, car plus maitrisé. Mais surtout fondateur. Déjà, leur précédent, The World Has Law, avait nettement calmé le jeu, ralenti les tempos, affiné l’utilisation des instruments. Avec Souls At Zero, extrait d’une phrase d’un roman de Clive Barker, l’auteur de Hellraiser, c’est de l’avis même des auteurs, un saut dans l’inconnu. L’ajout d’instruments tels que les violons, violoncelles ou synthé est un challenge. Ce n’est pas du gout de tous, et, dans la « Bay Area », nombreux sont les fans à les ranger dans la même catégorie que Faith No More. On en est loin. Les beats lourds, parfois tribaux, les harmonies mélancoliques ou angoissantes, les longues plages de calme qui précèdent les moments de rage et de déchainements  de chants gutturaux de Scott Kelly et Steve Von Till, hurlés et noyés dans les guitares, donnent corps à toute la rage et la frustration d’une génération bien plus efficacement que toute l’énergie des trois accords mal joués à 200BPM de tous les groupes de hardcore de l’époque.

La fin d’un moment de l’histoire, mais pas de l’Histoire

Les textes désenchantés et évoquant des images de fin du monde arrivent en synchronisme avec les premières alarmes « officielles » quant aux menaces du réchauffement climatique. On est en 1992, et le protocole de Kyoto est sur le point d’être signé suite à la sortie en condensé, à destination des gouvernements, du premier rapport du GIEC de 1990. C’est aussi la fin de la première guerre du golfe et le début des déboires américains au Moyen-Orient. C’est le démantèlement et le rush des vautours du néo-libéralisme sur les restes de l’empire soviétique, fausse fin de l’histoire—merci au « philosophe » /politologue « visionnaire » (ha, ha,ha !) amerloque, Francis Fukuyama qui publie également cette même année The End of History and the Last Man. La période historique est bien une période de basculement. Comme tout ces moments qui deviennent clés à posteriori, c’est bien la fin de quelque chose. Au niveau personnel, c’est la fin de l’adolescence pour votre serviteur—du moins officiellement, pour le reste il faudra encore attendre quelques dizaines d’années pour que cela pénètre jusqu’à son cerveau—et les questionnements sur la carrière à embrasser avec une entrée en école de cinéma qui ne saura tarder. Tout concorde et concours à se coordonner à ce moment précis, hasard des arcanes mystérieuses du temps et de l’espace.

No seed will grow of this barren earth

Our hope, unborn has died

I’ve slept in the dirt

Under the light of the moon

And I know our souls have perished

Souls At Zero

La quête

La première pierre de l’édifice

En 1999, Neurot Reccord, le label DIY lancé par les membres du groupe réédite les albums remasterisés en y incluant des bonus. C’est le moment de se rendre compte de l’importance de cet album et son influence sur la scène metal. Le Sludge et le Doom ont déjà acquis leurs lettres de noblesse. Si le terme Post-Metal n’existe pas encore en 1992 et émerge au tournant du siècle, des groupes ont déjà tenté d’explorer des contrées musicales proches. On citera les plus connus, l’expérimental Swans qui verra passer Thurston Moore dans ses rangs, sortira un album avec Jarboe qui collaborera aussi avec Neurosis, dans une moindre mesure, Prong ou Godflesh et leur metal-indus. Mais, pour le Post-Metal, dont S. A. Z. constitue certainement l’acte de naissance non officiel, des groupes comme Isis vont ensuite apporter de nouvelles pierres à l’édifice, suivis dans le courant de la première décennie 2000 par une scène riche (Cult Of Luna, Yob ou Deafhaven par exemple, jusqu’à Mastodon). Dans le même temps, on assistera à une diversification du genre avec des groupes proposant des compositions encore plus complexes (Meshuggah, Dillinger Escape Plan…) intégrants des influences jazz et progressives dans une musique qui lorgne vers la trance avec des titres qui dépassent régulièrement les dix minutes.

la quête du son et du spirituel dans le metal

Souls At Zero a également marqué le travail du son. C’est avec ce LP que le groupe a trouvé la direction qu’il allait explorer durant toute sa carrière : des superpositions de couches de samples, un son de guitare puissant appuyant des mélodies fortes, ce chant hurlé qui fera si bien école dans le genre, une alternance de passages acoustiques avec nappes de violons, des pianos, flutes et autres instruments peu communs jusqu’alors dans le style. Avec la référence au Wicker Man sur la couverture du disque, figure d’osier embrasé au début de chaque saison de labour par les druides de l’antiquité— censé enfermer des prisonniers sacrifiés, ce qui est aujourd’hui sujet à controverse— le groupe fait aussi entrer les sujets païens dans les thématiques abordées. Avec une certaine maladresse que viendra corriger l’expérience, ils donnent aussi une tournure plus introspective et spirituelle aux textes. L’album de 1992 n’est que le début d’un voyage plus long, plus profond qui continue encore aujourd’hui. Depuis lors, Neurosis n’a jamais succombé à la facilité et chaque album du groupe trace de nouvelles routes, explore de nouveaux horizons.

Sources :

https://www.theguardian.com/music/2010/dec/02/neurosis-live-at-roadburn

https://www.rollingstone.com/music/music-features/neurosis-on-30-years-of-finding-new-ways-of-being-heavy-108652/

https://web.archive.org/web/20130403224727/http://heavymetal.about.com/od/neurosis/gr/Neurosis-Souls-At-Zero-Review.htm

http://drownedinsound.com/releases/16019/reviews/4142167

Liens :

https://www.neurotrecordings.com/

https://www.facebook.com/officialneurosis/

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