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Fu Manchu contre les clones de l’univers

Fu Manchu contre les clones de l’univers

Le personnage énigmatique qui nous fixe sur la pochette du dernier album du quatuor californien pourrait figurer dans un roman de S. F. des années cinquante, ou illustrer une des publications du Livre de poche S. F. des années soixante-dix. Les couleurs psychédéliques nous plongent dans un univers tout droit sorti de l’imagination d’un Jack Vance ou Robert Silverberg. Depuis Sign of infinite power (2009), Fu manchu cultive cette imagerie de S. F. un peu désuète qui renvoie aux délires sous psychotrope des illustrateurs et affichistes de cette période et de ce lieu particulier que furent la Californie et les années 68-70. Les références à cette époque ne sont pas gratuites. Lorsqu’il parle de ce douzième album, Scott Reeder (batterie), évoque son intérêt pour Pink Floyd et l’album Tales from topographic ocean de Yes dont la pochette n’est pas sans rappeler le style graphique de Clone of… et évoque ces imaginaires de science-fiction de cette époque, mélange de space-opera et de fantastique médiéval.

yes_tales_from_topographic_oceans

Clone of the universe est d’ailleurs un peu comme le monolithe de 2001, a space odissey, imposant et massif. Qui plus est, il délivre un son hypnotisant au sein duquel les influences psychédéliques du groupe ressortent plus marquées que jamais. Si leurs incursions dans le genre étaient régulières, que cela soit sur des compositions entières, Sensei vs. sensei (We must obey), ou dans l’utilisation du flange et de la wah-wah, ils n’avaient jamais poussé aussi loin l’expérimentation que sur le morceau qui clôt cet album. Les cinq autres titres peinent à dépasser les quatre minutes, voir les trois minutes. Mais sur le septième et dernier, pour lequel ils ont invité Alex Lifeson de Rush, les passages heavy, les solos, les breaks psychédéliques où des guitares dégoulinantes de fuzz boostées au flanger et au delay se mélangent, les musiciens se sont octroyés une plage de… dix-huit minutes, soit la moitié de la durée de l’album. Ce titre pourrait faire office de bande son pour le trip qui termine le film de Kubrick, tout comme on pourrait pousser le parallèle en comparant cette expérimentation sonore qui prend une place démesurée à la fin de l’opus avec la longue fin psychédélique de 2001. Alors que plus prosaïquement, son titre le destinerait plutôt à servir de bande originale à un nanar de série z : Il Mostro Atomico, le monstre atomique. Bien que le guitariste/chanteur ait composé le riff principal depuis plusieurs mois, le morceau a été finalisé rapidement lors de la session, enregistré en une ou deux prises, et les quatre lignes de paroles incorporées au milieu ont été écrite le soir même par Scott Hill. Le guitariste de Rush a reçu les bandes et enregistré plusieurs propositions qui, si elles ont toutes séduit les musiciens, n’ont pas toutes été mixées. Le résultat, avec ce mélange de sonorités et d’effets, est ici :

https://www.youtube.com/watch?v=hP0bR7vpRVM

La production du précédent album m’avait un peu laissé sur ma faim ; même si à mon avis il n’existe pas de mauvais album du groupe, Gigantoid ne faisait pas partie de mes préférés. La marque de Fu Manchu (tatatin : serait-ce un épisode que l’on aurait raté du plus célèbre méchant asiatique que la littérature occidentale a créée?) ce mur de fuzz et de wah appuyé par un tempo souvent lourd et lent, une voix scandée à la manière d’un militant CGT dans une manif, le tout enrobé dans un cocon réconfortant de saturation, guitares en avant méritait une production plus ample. C’est enfin chose faite avec cet album au son puissant sorti sur leur propre label, At the dojo Records, et co-produit (tout comme Gigantoid) par Jim Monroe au Racket Room à Santa Ana (la liste des artistes enregistrés et produits par ce studio est trop longue. Vous pouvez aller la consulter ici : http://racketroom.com/artists.html )

Comme à chaque fois, le tour de force des quatre musiciens est d’arriver à construire des compositions complexes sur des durées relativement brèves, comme sur Clone of the universe, où les thèmes et les changements de rythmes s’enchainent appuyés par les breaks furieux de Scott Reeder, qui remplaça Brant Bjork après California crossing en 2001. Toute la première partie du morceau Slower than light rappelle combien ils excellent  dans ces tempo extrêmement lourds et lents qui feraient passer Down pour du speed metal. Puis, comme ne pouvant plus tenir devant la rampe de skate, ils s’élancent au beau milieu du titre dans un doublement du tempo qui promet de beaux slams durant les concerts.

Il est bien difficile de savoir à quoi se réfère Hill lorsqu’il chante Clone of the universe. Ce clone est-il un microcosme, comme peut l’être la foule d’un concert, les spectateurs d’un contest de skate? Si comme le déclare Scott Reeder, le groupe désirait s’appuyer de moins en moins sur le chant et de plus en plus sur l’instrumental, alors peut-être ne faut-il alors pas trop chercher à interpréter les paroles et se laisser porter par ce qu’elles suggèrent…

Un petit plaisir : la première video de l’interprétation live du maintenant fameux Il mostro atomico

Entrer dans la musique de Fu Manchu, c’est un peu comme pénétrer dans la machine d’un savant fou qui effectuerait des sauts temporels inattendus. Comme un time-lapse qui accélèrerait pour ralentir d’un seul coup, projetant l’auditeur et sa nuque rompu au headbanging, dans un mouvement ralenti assez jouissif. Les compositions qui émaillent ce douzième opus sont montées avec les mêmes recettes que les précédents.

Il faut dire que la musique de Fu Manchu est à l’image de son leader inébranlable, Scott Hill, qui, après plus de quarante ans de carrière, arbore toujours sa crinière flamboyante, porte toujours les éternelles Van’s © (enfin, au vue de la durée de vie moyenne d’une paire et la rapidité à laquelle elles acquièrent l’odeur du maroilles planqué au fond du réfrigérateur, je pense qu’il a du en changer plusieurs fois), elle ne bouge certes pas d’un iota, mais en revanche, elle ne vieillit pas.

Clone of the universe, sortie le 9 février sur At the dojo Records

Fu Manchu en tournée US et Europe :

Le 2 mars au Trabendo pour la date française

https://fu-manchu.com/tour-dates/

 

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